07 juin 2007

Dimanche de tous les Saints




Saints français







Mathieu X, 32-33, 37-38 XIX 27-30

Chap 10 32
Celui qui se prononcera pour moi devant les hommes, moi aussi je me prononcerai pour lui devant mon Père qui est aux cieux.
33 Mais celui qui me reniera devant les hommes, moi aussi je le renierai devant mon Père qui est aux cieux.
37 Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n'est pas digne de moi ; celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n'est pas digne de moi ;
38 celui qui ne prend pas sa croix et ne me suit pas n'est pas digne de moi.

Chap 19
27 Alors Pierre prit la parole et dit à Jésus : « Voilà que nous avons tout quitté pour te suivre : alors, qu'est-ce qu'il y aura pour nous ? »
28 Jésus leur déclara : « Amen, je vous le dis : quand viendra le monde nouveau, et que le Fils de l'homme siégera sur son trône de gloire, vous qui m'avez suivi, vous siégerez vous-mêmes sur douze trônes pour juger les douze tribus d'lsraël.
29 Et tout homme qui aura quitté à cause de mon nom des maisons, des frères, des soeurs, un père, une mère, des enfants, ou une terre, recevra beaucoup plus, et il aura en héritage la vie éternelle.
30 Beaucoup de premiers seront derniers, beaucoup de derniers seront premiers.



Méditation d’un moine de l’Eglise d’occident


Chers frères et sœurs ;

Dimanche dernier nous fêtions la Pentecôte, la"venue de l'Esprit-Saint tant attendu, aussi n'est-il pas étonnant de solenniser aujourd'hui tous les saints; c'est-à-dire ceux qui au cours de leur existence se sont sanctifiés et se sont laissés modeler par la présence du Consolateur, de l'Esprit de Vérité.

Quelle grâce que celle d'avoir les saints à nos côtés tout au long de notre pèlerinage terrestre!
En eux nous avons des intercesseurs puissants dans les moments où notre foi se fait défaillante; en eux nous avons des modèles pour nos vies ; en eux nous trouvons réconfort, courage et paix.

Dieu est glorifié par eux, tout autant que Dieu les glorifie.

Dieu est Amour ; et dans les Saints, le Saint-Esprit est amour.

Ainsi que nous le rappelle Saint Silouane de l'Athos: « Tous les Saints vivent dans le Royaume des Cieux, avec le Seigneur et Sa Mère Toute Pure .Là sont les Ancêtres et les Patriarches qui ont courageusement confessé leur Foi ; les prophètes qui ont reçu
le Saint Esprit et qui par leur parole ont appelé le peuple vers Dieu ; les Apôtres qui
sont morts pour avoir proclamé l'Evangile ; les Martyrs qui par amour du Christ ont donné leur vie avec joie; les saints Evêques qui ont imité le Seigneur et porté le Fardeau de leurs brebis spirituelle s; les saints Ascètes et les Fois en Christ qui par leur exploit ont vaincu le monde et tous les Justes qui ont gardé les commandements de Dieu et ont vaincu leurs passions.
Par le Saint-Esprit les Saints voient les souffrances des hommes sur la terre. Ils voient et savent comme nous sommes accablés de peines, comme nos cœurs sont desséchés, comme l'abattement paralyse nos âmes et; sans se lasser ils intercèdent en notre Faveur auprès de Dieu. »

Oui ; les saints et les saintes nous sont un peu comme des frères et sœurs car ils participent par la grâce aux caractères particuliers de Dieu et nous les font partager.

Ils ont quitté cette vie sans l'abandonner pour autant, comme l'a fait le Christ par Son Incarnation pour habiter parmi nous.
Les saints sont nos frères aînés sur terre en même temps qu'ils sont nos prédécesseurs dans les cieux pour y intercéder avec assurance en notre faveur, présentant ainsi chacun de nous au Seigneur.

Dans son discours catéchétique sur Saint Nicolas, le Père Emilianos de Simonos-Pétra nous fait remarquer à juste titre combien la période allant de Pâques à la Pentecôte nous a donné de modèles de sainteté pour notre édification propre :
« Incrédule, l'Apôtre Thomas refuse de croire, mais il fut jugé digne de confesser sa fidélité et sa foi en Dieu, de proclamer la divinité du Christ. Il était de faible constitution, il perdait facilement courage et patience, il éprouvait difficilement de la joie en présence du Christ; et cependant c'est à lui que le Christ a dit : « Viens ; mets ta main, vois de tes yeux ». Combien de fois Dieu ne nous dit-il pas à nous aussi « mets tes mains » et le Christ lui-même place nos mains dans la marque de ses clous.

Continuons avec ces femmes qui reçurent le surnom de Myrophores. Dieu a utilisé leur [apparente] faiblesse pour manifester la puissance de la Résurrection et pour l'annoncer aux disciples et apôtres.
Ensuite nous avons le paralytique. Pensez-vous qu'il possédait en lui-même la force de recouvrer la santé psychique et corporelle ? Seul le Dieu invisible était Celui, qui en tout, agissait. C'est le Christ qui a transformé le paralytique en prédicateur de la grâce.
Puis la Samaritaine, une femme pécheresse, livrée à la prostitution, perçoit directement le mystère du Christ et le transmet à un peuple qui n'avait jamais admis le peuple d'Israël.
Enfin l'aveugle-né qui deviendra proclamateur du Fils de Dieu, car ses yeux ont vu le monde matériel, mais son âme a reconnu le mystère de la divinité. »

C'est donc un grand nombre d'âmes courageuses, vraies et fortes que la Puissance de Dieu a maintenues au cours des siècles, et qui sans cela seraient tombées le long du chemin.
Ce ne sont pas ceux dont la vie a été facile qui ont maintenu la foi vivante pour la transmettre aux générations futures mais bien plutôt ceux qui ont dû lutter, souffrir et parfois même mourir pour le Christ.
N'oublions jamais que notre vie terrestre n'est pas avant tout celle du corps mais celle de l'âme.
Pourtant ne vivons-nous pas bien souvent que dans le seul but de satisfaire les besoins et les désirs du corps ?
Essayons de ne pas négliger ceux de l'âme!

Acceptons cette tâche et il en résultera en nous-même d’étonnantes transformations ; sachons en toute humilité et sans crainte aucune, voir objectivement notre âme ; acceptons que Dieu la façonne avec nous par Son Esprit de sainteté.
C'est tout le sens du « porter sa croix » quant au renoncement à soi-même cela signifie se dépouiller de notre ego, de notre vieil homme.
Se dépouiller, se faire pauvre toujours et toujours plus et se faire ainsi réceptacles de la grâce venue d'en-Haut...

La sainteté est donc bien l’œuvre du Saint-Esprit, le fruit de la Pentecôte.
La sainteté est l'épanouissement de toute vie chrétienne.
L’appel à la sainteté est adressé à chacun d'entre-nous ainsi que l'explicite Saint Séraphin de Sarov dans son célèbre entretien avec Motovilov : « le but de la vie chrétienne est l'acquisition de l'Esprit-Saint ».

La sainteté, notre sanctification en vue du Royaume de Dieu doit donc être notre tâche primordiale. Mais comment la réaliser, comment la vivre dans notre quotidien qui oscille entre l'affligeante banalité de la routine et l'agitation troublante qu'impose parfois la vie moderne?

C'est tout simple, sans être forcément facile tous les jours ! mais c'est simple quand-même :

C'est vivre pleinement l'instant présent en se sachant sous le regard paternel et incomparablement aimant de Dieu.
C'est faire fi de notre passé sans s'inquiéter de l'avenir.
C'est rejeter tout sentiment d'impuissance ou d'insuffisance, rejeter les pessimismes que l'on porte sur soi-même... afin que s'éclaire la paix du cœur.
C'est rendre grâce en tout temps et en tout, au sein de l'épreuve comme au sein de la joie; joie grâce à laquelle il nous est permis de surmonter de manière certaine et efficace nos craintes et nos angoisses les plus ancrées.
Enfin, c'est partir du principe qu'il n'y a jamais d'injustice dans la vie spirituelle puisque tout est pour notre profit en vue de notre union à Dieu; tout pouvant et devant être un terrain de rencontre avec le Dieu Vivant.

Rencontrer Dieu, lui parler, c'est prier, c'est être en relation avec Celui qui depuis la Genèse n'a de cesse de mettre l'homme debout.

Et prier c'est se sanctifier.

Combien avons-nous d'occasions et de possibilités de prier !

Que ce soient les prières établies par la grande Tradition de l'Eglise, la lecture méditative de l'Ecriture Sainte, des oeuvres des Saints Pères, ou (si la fatigue se faisant sentir, la formulation dans la prière ,devient impossible pour un temps) le simple émerveillement gratifiant devant la beauté de la Création, devant la beauté en tant que reflet de la Sainteté, donc devant la beauté comme reflet de Dieu !
Que dans notre cœur, tout ne soit que grâce et action de grâce, que tout chante en nous : « Alleluia! »

Chers frères et sœurs, pour conclure faisons nôtre cette exhortation du Père Emilianos : «prions afin de comprendre combien le Seigneur nous « crie » à Son Père, pour que nous devenions nous-mêmes imitateurs de Sa propre voix, de Sa Passion, de Son vouloir et de Son désir» que nous soyons semblables à des linges liturgiques imbibés de sainteté, des épîtres de Ses paroles, des miroirs de Sa Gloire ! »

Amen !


Méditation de Père Alphonse et Rachel

Chers Amis,


La fête de la Pentecôte est celle de l’accomplissement de tout, c’est l’achèvement de la Création, l’ouverture de la plénitude des temps. Il appartient maintenant à l’homme de vivre celle-ci. C’est pourquoi le dimanche après la Pentecôte est celui de la Trinité, toujours présente désormais à travers ce long temps qui va se dérouler jusqu’à l’Avent. Chemin des fantassins que nous sommes dans les méandres du jour, temps de l’apprentissage de la vie. Mais sur ce Chemin, rien n’est possible sans contempler la Source de toute vie.

Comment le mystère de la Vie procède-t-il, comment la Vie fait-elle pour vivre pleinement ? Quelle est l’image à laquelle nous sommes créés, vers quelle « ressemblance » (« programme ») devons-nous cheminer ? Une seule réponse : Dieu. Car Dieu nous crée, nous suscite à chaque instant, nous sortons de Lui comme le ruisseau d’une source. Mais alors effectivement, la seule chose qui importe est de connaître Dieu !

Nous n’en savons que ce que l’Ecriture Sainte nous a révélé de Lui : Dieu est Amour. Nous ne pouvons risquer ce mot qu’en contemplant Dieu, un seul Dieu en Trois Personnes qui s’aiment éternellement. Non trois personnes juxtaposées, mais trois générosités qui se donnent l’une à l’autre en plénitude. Chacune des Trois Personnes n’est pour elle-même qu’en étant pour les deux autres. Le Père n’existe comme Père distinct du Fils qu’en se donnant tout entier au Fils ; le Fils n’existe comme Fils distinct du Père qu’en étant tout entier élan d’amour pour le Père. Le Père n’existe pas d’abord comme personne constituée en elle-même et pour elle-même : c’est l’acte d’engendrer le Fils qui le constitue personne. S’il n’y avait pas le Fils, il ne serait pas Père, c’est bien évident. Chaque personne n’est soi qu’en étant hors de soi. Elle est posée dans l’être en étant posée dans l’autre. Dans le Père, dans le Fils, dans le Saint Esprit, il y a impossibilité absolue du moindre repliement sur soi. En d’autres mots, ce qui constitue fondamentalement les Personnes Divines c’est leur dépouillement absolu, la personne en Dieu est constituée tout entière et exclusivement par la référence à l’Autre, par un regard, par un élan vers l’Autre ; toute la propriété en Dieu c’est la désappropriation totale. Dieu est dépouillement, Pauvreté, Dieu n’a rien parce qu’Il donne tout .

Mais voilà pourquoi Il est aussi l’Infinie liberté, libre de soi, n’ayant aucune attache à soi. La liberté c’est d’abord cela : d’être coupé de toute adhérence à soi, de ne plus coller à soi, de ne plus se subir soi-même, mais de faire de toute la vie un don dans un pur élan d’amour.Alors, à l’image de la Trinité, vivre c’est aimer. Aimer, c’est être et vivre pour l’autre et par l’autre, pour les autres et par les autres, jamais par soi et pour soi. Chacune des Personnes Divines n’est elle-même qu’en étant par et pour les deux autres. Pour l’autre : c’est le don ; par l’autre : c’est l’accueil. Accueillir et donner c’est aimer. Dieu est une puissance infinie, c’est-à-dire sans limite, de renoncement à être pour soi et par soi.Ce qui nous est révélé là, c’est que la relation d’amour est la forme originelle de l’être. Ou, ce qui revient au même, le fond de l‘être est amour, communion. Ainsi le mystère trinitaire éclaire toute l’existence humaine.Parce que nous savons qui est Dieu, nous savons ce que nous devons être. La personne humaine, c’est l’être qui se réalise en donnant et qui, ne se cherchant pas lui-même, se trouve dans un autre.

La vie nous est donnée pour que nous tendions vers les autres, afin de nous donner à eux comme font entre elles les Trois Personnes Divines. Tendre vers les autres, non pour les conquérir ou les posséder, mais pour les enrichir et les grandir. Comme nous le disions à propos du Père, notre personne ne s’éveille que dans l’acte d’engendrer, de grandir l’autre !! L’amour gratuit de l’autre a la capacité de le faire naître à des dimensions mystérieuses et inconnues de lui-même.Mais pour aimer comme s’aiment les trois Personnes divines, il faut être soi-même, le plus profondément et le plus consciemment possible. Il faut vouloir que les autres soient, le plus profondément et le plus consciemment possible. Et non seulement le vouloir en pensée, en désir, mais agir pour qu’ils le soient.

Je veux que tu sois toi et je me consacre toute entier à ce que tu sois pleinement toi. Et ce qui est vrai pour les individus est vrai pour les patries, les races, les civilisations. Fedorov disait : « Il n’y a pas d’autre programme social et politique que la vie de la Divine Trinité et leur relation ! »Ce mystère inouï est en réalité l’expression de notre propre intimité. La respiration est le grand mouvement de la Vie, qui d’un pôle se donne et d’un autre se reçoit, accueil et don ; entre les deux, l’intervalle, l’abîme du silence. C’est ce dernier, le Père, qui m’engendre fils avec le Fils dans l’inspir et, dans l’expir, répand en moi la plénitude des énergies du Souffle !Tout est dans la conscience du soufle…Avec toute notre affection, à bientôt !



Père Alphonse et Rachel

Texte à méditer :
Cette prière veut nous faire contempler le mystère de la sainte Trinité :

O toi l’au-delà de tout, comment t’appeler d’un autre nom ?
Quel hymne peut te chanter ?
Aucun mot ne t’exprime. Quel esprit peut te saisir ?
Nulle intelligence ne te conçoit. Seul, tu es ineffable ; tout ce qui se dit est sorti de toi.
Seul, tu es inconnaissable ; tout ce qui se pense est sorti de toi. Tous les êtres te célèbrent, ceux qui parlent et ceux qui sont muets.
Tous les êtres te rendent hommage, ceux qui pensent comme ceux qui ne pensent pas. L’universel désir, le gémissement de tous tend vers toi. Tout ce qui existe te prie et vers toi, tout être qui sait lire ton univers, fait monter un hymne de silence.
En toi seul tout demeure.En toi, d’un même élan, tout déferle.
De tous les êtres tu es la fin. Tu es unique.
Tu es chacun et tu n’es aucun.
Tu n’es pas un être, tu n’es pas l’ensemble : tu as tous les noms ; comment t’appellerai-je, Toi, le seul qu’on ne peut nommer ?
Aie pitié, ô toi, l’au-delà de tout : comment t’appeler d’un autre nom.

Grégoire de Nazianze (IV ° siècle)