28 avril 2007

Dimanche de l'aveugle de naissance



Jean 9, 1-38

1 Jésus vit, en passant, un homme aveugle de naissance.
2 Ses disciples lui firent cette question : Rabbi, qui a péché, cet homme ou ses parents, pour qu'il soit né aveugle?
3 Jésus répondit : Ce n'est pas que lui ou ses parents aient péché; mais c'est afin que les oeuvres de Dieu soient manifestées en lui.
4 Il faut que je fasse, tandis qu'il est jour, les oeuvres de celui qui m'a envoyé ; la nuit vient, où personne ne peut travailler.
5 Pendant que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde.
6 Après avoir dit cela, il cracha à terre, et fit de la boue avec sa salive. Puis il appliqua cette boue sur les yeux de l'aveugle,
7 et lui dit: Va, et lave-toi au réservoir de Siloé (nom qui signifie envoyé). Il y alla, se lava, et s'en retourna voyant clair.
8 Ses voisins et ceux qui auparavant l'avaient connu comme un mendiant disaient: N'est-ce pas là celui qui se tenait assis et qui mendiait?
9 Les uns disaient: C'est lui. D'autres disaient: Non, mais il lui ressemble. Et lui-même disait: C'est moi.
10 Ils lui dirent donc: Comment tes yeux ont-ils été ouverts?
11 Il répondit: L'Homme qu'on appelle Jésus a fait de la boue, a oint mes yeux, et m'a dit: Va au réservoir de Siloé, et lave-toi. J'y suis allé, je me suis lavé, et j'ai recouvré la vue.
12 Ils lui dirent: Où est cet homme? Il répondit: Je ne sais.
13 Ils menèrent vers les pharisiens celui qui avait été aveugle.
14 Or, c'était un jour de sabbat que Jésus avait fait de la boue, et lui avait ouvert les yeux.
15 De nouveau, les pharisiens aussi lui demandèrent comment il avait recouvré la vue. Et il leur dit: Il a appliqué de la boue sur mes yeux, je me suis lavé, et je vois.
16 Sur quoi quelques-uns des pharisiens dirent: Cet homme ne vient pas de Dieu, car il n'observe pas le sabbat. D'autres dirent: Comment un homme pécheur peut-il faire de tels miracles?
17 Et il y eut division parmi eux. Ils dirent encore à l'aveugle: Toi, que dis-tu de lui, sur ce qu'il t'a ouvert les yeux? Il répondit: C'est un prophète.
18 Les Juifs ne crurent point qu'il eût été aveugle et qu'il eût recouvré la vue jusqu'à ce qu'ils eussent fait venir ses parents.
19 Et ils les interrogèrent, disant: Est-ce là votre fils, que vous dites être né aveugle? Comment donc voit-il maintenant?
20 Ses parents répondirent: Nous savons que c'est notre fils, et qu'il est né aveugle;
21 mais comment il voit maintenant, ou qui lui a ouvert les yeux, c'est ce que nous ne savons. Interrogez-le lui-même, il a de l'âge, il parlera de ce qui le concerne.
22 Ses parents dirent cela parce qu'ils craignaient les Juifs; car les Juifs étaient déjà convenus que, si quelqu'un reconnaissait Jésus pour le Christ, il serait exclu de la synagogue.
23 C'est pourquoi ses parents dirent: Il a de l'âge, interrogez-le lui-même.
24 Les pharisiens appelèrent une seconde fois l'homme qui avait été aveugle, et ils lui dirent: Donne gloire à Dieu; nous savons que cet homme est un pécheur.
25 Il répondit: S'il est un pécheur, je ne sais; je sais une chose, c'est que j'étais aveugle et que maintenant je vois.
26 Ils lui dirent: Que t'a-t-il fait? Comment t'a-t-il ouvert les yeux?
27 Il leur répondit: Je vous l'ai déjà dit, et vous n'avez pas écouté; pourquoi voulez-vous l'entendre encore? Voulez-vous aussi devenir ses disciples?
28 Ils l'injurièrent et dirent: C'est toi qui es son disciple; nous, nous sommes disciples de Moïse.
29 Nous savons que Dieu a parlé à Moïse; mais celui-ci, nous ne savons d'où il est.
30 Cet homme leur répondit: Il est étonnant que vous ne sachiez d'où il est; et cependant il m'a ouvert les yeux.
31 Nous savons que Dieu n'exauce point les pécheurs; mais, si quelqu'un l'honore et fait sa volonté, c'est celui là qu'il l'exauce.
32 Jamais on n'a entendu dire que quelqu'un ait ouvert les yeux d'un aveugle-né.
33 Si cet homme ne venait pas de Dieu, il ne pourrait rien faire.
34 Ils lui répondirent: Tu es né tout entier dans le péché, et tu nous enseignes! Et ils le chassèrent.
35 Jésus apprit qu'ils l'avaient chassé; et, l'ayant rencontré, il lui dit: Crois-tu au Fils de Dieu?
36 Il répondit: Et qui est-il, Seigneur, afin que je croie en lui?
37 Tu l'as vu, lui dit Jésus, et celui qui te parle, c'est lui.
38 Et il dit: Je crois, Seigneur. Et il se prosterna devant lui.



Homélie d'un moine orthodoxe de l'Eglise d'occident


Chers Père, Mères, frères et sœurs ; Christ est ressuscité !


De l’Evangile de ce dimanche, deux thèmes capitaux et intrinsèquement liés ressortent ; celui de la lumière et celui de la vie. Ces deux thèmes sont d’ailleurs ; entre autres ; deux des « qualificatifs » par lesquels le Christ s’est révélé à nous ainsi que nous pouvons le lire dans l’évangile de Saint Jean : « Je Suis la Lumière, Je Suis la Vie ».

Par définition l’aveugle est celui qui ne voit pas ; donc celui qui est privé de lumière, celui qui est condamné à vivre dans les ténèbres…
Mais est-ce réellement « vivre » que d’être plongé dans ce monde de ténèbres et d’obscurité ? Certes non ! Ce serait plutôt de l’ordre du « survivre » plutôt que de celui du «vivre» ! Or le Christ est venu pour nous donner la Vie et nous la donner en plénitude, tel le semeur qui déploie son geste avec abondance afin que le grain tombé en terre meure, porte des fruits au centuple ; promettant ainsi une moisson généreuse et foisonnante.

Pour revenir à la péricope d’aujourd’hui nous voyons que le Christ va au-devant de l’aveugle dans le but de le guérir, dans le but de lui rendre la vue et de lui permettre de voir la lumière; littéralement parlant, dans le but de « l’illuminer » ; sans pour autant que l’aveugle ait demandé quoi que ce soit au Seigneur ; à ce stade précis du récit aucune parole n’a encore été échangée entre lui et le Sauveur.
Pour guérir l’aveugle, le Christ lui applique de la glaise sur les yeux, cette même glaise vivifiante dont Dieu s’était servi pour façonner l’homme à Son image lors de la création du monde ; de sorte qu’ayant recouvré la vue, l’aveugle puisse contempler dans une dynamique de vie et de lumière Celui qui était dès avant les siècles, Celui qui est l’icône par excellence.

Dès la guérison accomplie remarquons que le dialogue s’instaure entre l’ancien aveugle et le Christ ; et nous savons tous ici que le dialogue entre Dieu et Sa créature n’a d’autre nom que la prière ; cette prière qui nous donne d’être en relation avec Celui qui est le Verbe ; cette prière qui ne doit jamais nous quitter et à laquelle nous devons tendre de toutes nos forces car elle ratifie l’authenticité de notre foi et de notre relation à Dieu.

« Je crois Seigneur » dit l’homme au Christ ; telle est et doit être notre démarche au quotidien, puisqu’à nous aussi il a été donné de rencontrer le Christ, ou plutôt devrions-nous dire puisque nous avons gratuitement reçu la grâce que le Christ vienne à notre rencontre, par ce don d’amour personnel et unique dont Il nous a fait preuve, par cet appel unique et personnel qu’Il nous a adressé un jour et qu’Il ne cesse de nous adresser à chaque instant de notre vie.
La réponse à cet appel est simple ; elle est semblable à celle donnée par l’aveugle restauré dans sa dignité d’homme nouveau à savoir : « C’est moi ».

Non pas le « moi » égocentrique et orgueilleux bien sûr ; mais plutôt en tant qu’affirmation libre, responsable et assumée de notre désir d’union à Dieu, analogue au « fiat » de la Mère de Dieu : « Me voici Seigneur, qu’il m’advienne selon Ta Parole ! » ; affirmation qui se fera tout autant action de grâce les jours de liesse, que supplication dans les moments plus sombres que nous pourrons traverser ; ou bien encore acceptation de la volonté divine à notre endroit ; acceptation toute de confiance et exempte d’angoisse et de crainte car nous savons qu’elle nous conduit sur un chemin -certes étroit- mais que ce chemin nous mène vers Celui auquel nos cœurs aspirent de tout leur être. En somme, nous devons tendre à devenir tout comme la Mère de Dieu à la fois des prières vivantes et des pierres vivantes de l’Eglise.

A cette condition uniquement ; à la suite de l’aveugle-né qui en aucune façon n’a rejeté le Christ qui venait à lui, nous passerons des ténèbres de l’in-connaissance au plein éclat de la Lumière de la Connaissance de Dieu ; ainsi que l’exprime Saint Silouane : « Plus complet est l’amour, plus complète est la connaissance ; plus brûlant est l’amour, plus ardente est la prière ; plus parfait est l’amour, plus sainte est la vie » !


Amen !



Homélie : Maladie et guérison à travers le judéo-christianisme