27 mai 2007

La Pentecôte


Evangile de la Liturgie ( Jean 7: 37-52, 8:12)

Le dernier jour, le grand jour de la fête, Jésus, se tenant debout, s'écria: Si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi, et qu'il boive. Celui qui croit en moi, des fleuves d'eau vive couleront de son sein, comme dit l'Ecriture.
Il dit cela de l'Esprit que devaient recevoir ceux qui croiraient en lui; car l'Esprit n'était pas encore, parce que Jésus n'avait pas encore été glorifié.
Des gens de la foule, ayant entendu ces paroles, disaient: Celui-ci est vraiment le prophète. D'autres disaient: C'est le Christ. Et d'autres disaient: Est-ce bien de la Galilée que doit venir le Christ? L'Ecriture ne dit-elle pas que c'est de la postérité de David, et du village de Bethléhem, où était David, que le Christ doit venir? Il y eut donc, à cause de lui, division parmi la foule. Quelques-uns d'entre eux voulaient le saisir, mais personne ne mit la main sur lui. Ainsi les huissiers retournèrent vers les principaux sacrificateurs et les pharisiens. Et ceux-ci leur dirent: Pourquoi ne l'avez-vous pas amené?
Les huissiers répondirent: Jamais homme n'a parlé comme cet homme.
Les pharisiens leur répliquèrent: Est-ce que vous aussi, vous avez été séduits? Y a-t-il quelqu'un des chefs ou des pharisiens qui ait cru en lui? Mais cette foule qui ne connaît pas la loi, ce sont des maudits!
Nicodème, qui était venu de nuit vers Jésus, et qui était l'un d'entre eux, leur dit: Notre loi condamne-t-elle un homme avant qu'on l'entende et qu'on sache ce qu'il a fait? Ils lui répondirent: Es-tu aussi Galiléen? Examine, et tu verras que de la Galilée il ne sort point de prophète.
Jésus leur parla de nouveau, et dit: Je suis la Lumière du monde; celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la Lumière de la vie.

Etude sur l'icône de la Pentecôte Conférence de Maria Lavie

Homélie d'un moine orthodoxe de l'Eglise d'occident
Chers frères et sœurs !

Il serait bon de rappeler que la solennité que nous célébrons aujourd’hui s’inscrit dans un héritage qui nous vient du Judaïsme, ce qui nous aidera à mieux en percevoir le sens.
La fête juive de Pentecôte célébrait le don de la Loi, - la Tôrah -, que Dieu avait fait à Moïse, en faveur des tribus d’Israël qu’il avait tirées de la captivité des égyptiens. Le terme hébreu de Tôrah qui signifie enseignement, désigne l’ensemble des cinq premiers Livres de la Bible. Or quand on parle plus précisément du cœur de la Loi de Moïse, de ce qu’il a reçu au mont Sinaï, on parle des dix commandements ; ces commandements qui font partie des fondements de notre foi: « Tu adoreras le Seigneur ton Dieu et tu Le serviras Lui seul… Tu honoreras ton père et ta mère… Tu ne tueras pas, tu ne commettras pas d’adultère, tu ne voleras pas, tu ne porteras pas de faux témoignage…» pour n’en citer que quelques-uns. Et le Seigneur dira à maintes reprises à son peuple au long de son histoire : si vous pratiquez toute cette Loi que Je vous donne, vous connaîtrez la plénitude… étant sous-entendu que si il n’en est pas ainsi nous risquons de rencontrer quelques petits problèmes dans nos chemins de vie !

Cela peut nous faire réfléchir d’emblée sur le rôle de la Loi dans toute société humaine ainsi que dans notre vie personnelle. Cette Loi est toujours nécessaire, qu’il s’agisse d’un groupe humain ou d’une seule personne. Et même si nous prétendons ne pas en avoir besoin, si nous voulons absolument en faire abstraction ; nous en suivrons toujours une…ne serait-ce que celle d’agir selon notre volonté propre ! Et l’expérience d’une telle « liberté » montre que, loin d’être libre, on devient captif de nos propres caprices, de nos passions, en bref, de notre orgueil…

La Loi, nous dit saint Paul, fait office de « pédagogue », elle n’est donc pas un but en soi, mais simplement un moyen. Elle vise à nous faire grandir et nous faire avancer vers un but ; c'est-à-dire vers Dieu qui nous apportera plénitude de vie et paix intérieure. Cette vie et cette paix intérieure ont une dimension infinie, puisqu’il s’agit pour l’homme d’accueillir la possibilité de devenir enfants de Dieu, cohéritiers du Christ, compagnons des Anges et des Saints ! A l’époque de l’Exil à Babylone, les Prophètes ont annoncé clairement à Israël une Nouvelle Alliance qui se substituerait à l’ancienne, gravement violée par les infidélités multiples du Peuple élu. C’est ainsi que nous pouvons lire dans le Livre d’ Ezéchiel (36) : « De toutes vos souillures et de toutes vos abominations Je vous purifierai, dit le Seigneur ; Je vous donnerai un cœur nouveau et Je vous inspirerai un esprit nouveau. J’enlèverai votre cœur de pierre et Je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai en vous mon Esprit et Je ferai en sorte que vous suiviez mes préceptes et pratiquiez mes commandements. » Dans la traduction de la Septante, les termes traduisant « préceptes » et « commandements » ont des nuances plus précises : à savoir que l’Esprit du Seigneur donnera le discernement voulu pour accomplir ce qui est juste. Alors la Loi nouvelle, bien loin d’être une entrave pour la liberté humaine, sera au contraire, pour nous (si nous l’accueillons avec générosité), un dynamisme libérateur, vivifiant pour développer les dons et les aptitudes personnels que nous avons reçus par la grâce divine.

Mais comment est-ce possible pouvons-nous légitimement nous demander ?

C’est l’expérience qui le montrera au fil des siècles, et c’est précisément l’accomplissement de cette promesse de Dieu que les Apôtres expérimentent au jour de Pentecôte.
En recevant le don de l’Esprit Saint, ils sont habités par une assurance extraordinaire qui leur fait annoncer avec force le mystère du Christ mort et ressuscité pour le salut du monde. Le symbolisme du vent impétueux et des langues de feu qui se posent sur les Apôtres réunis dans la prière et l’attente du l’Esprit est bien clair : le temps de l’attente est passé, l’Esprit vient et Il envoie l’Eglise naissante en mission vers tous les peuples de la terre.

Afin de confirmer la véracité de sa prédication, l’Esprit Saint accordera à l’Eglise des dons variés qui ne cesseront plus, depuis les premiers siècles jusqu’à nos jours, et au-delà, jusqu’à la fin des temps. Il y a les charismes extraordinaires dont les écrits apostoliques sont les témoins, il y a aussi les dons moins voyants peut-être, mais non moins efficaces pour la construction de l’Eglise, ceux en particulier que saint Paul évoque dans l’épître aux Galates. Et s’il est évident que ces charismes extraordinaires existent encore, pour toucher les cœurs et leur faire reconnaître la miséricorde de Dieu à leur égard, il est non moins capital que le Seigneur nous rappelle toujours que l’amour, la joie et la paix à tous niveaux sont des dons indispensables dans la vie de toute communauté humaine ; à commencer par sa famille et sa communauté ecclésiale. N’oublions pas que l’homme ne parcourt pas le chemin du salut tout seul, mais en Eglise et que nous tous ; membres de l’Eglise ; nous recevons les richesses du salut, notamment par les sacrements, et y puisons une ardeur missionnaire qui se sait toujours en lien vital avec l’Eglise du Christ.

De nos jours il y a une importance urgente à faire grandir ce lien de communion à tous les niveaux de l’existence humaine : avant toute chose en nous-mêmes, puis entre les personnes : au sein de la famille et des communautés, entre groupes sociaux et entre les nations. Un lien qui ne soit pas que virtuel, mais un lien par lequel les personnes puissent se rencontrer et s’aimer en ce qu’elles ont de meilleur et de plus élevé spirituellement parlant. Rester au seul plan des réalités terrestres, sans y apporter le regard de la foi, serait stérile pour ceux qui veulent suivre le Christ. De nos jours en effet ; pour son salut ; le monde a plus que jamais besoin de témoins vivants de la Résurrection. Aussi est-il d’autant plus nécessaire et vital d’approfondir notre foi par une connaissance de Dieu et une expérience spirituelle toutes deux toujours plus renouvelées.

Nous faisons mémoire, dans l’Eucharistie que nous célébrons, du mystère pascal du Christ qui s’est fait le Médiateur entre Dieu et les hommes au prix de sa kénôse, de son anéantissement. Suspendu à la croix, au moment de mourir Il a remis son Esprit au Père pour nous en faire le don dès Sa Résurrection. Que cette fête de Pentecôte soit pour chacun de nous un jour de renouvellement de notre foi par les merveilles que Dieu veut accomplir en nous, par nous et autour de nous ; pour que soit glorifié Son Saint Nom parmi toutes les nations. Mais gardons toujours présent à l’esprit et dans le cœur que toute activité missionnaire tire sa fécondité de la prière personnelle et communautaire, faite en Eglise et dans la tradition apostolique.

Amen !
Epitre de la Liturgie ( Actes 2:1-11)



Le jour de la Pentecôte, ils étaient tous ensemble dans le même lieu. Tout à coup il vint du ciel un bruit comme celui d'un vent impétueux, et il remplit toute la maison où ils étaient assis. Des langues, semblables à des langues de feu, leur apparurent, séparées les unes des autres, et se posèrent sur chacun d'eux.
Et ils furent tous remplis du Saint Esprit, et se mirent à parler en d'autres langues, selon que l'Esprit leur donnait de s'exprimer.
Or, il y avait en séjour à Jérusalem des Juifs, hommes pieux, de toutes les nations qui sont sous le ciel. Au bruit qui eut lieu, la multitude accourut, et elle fut confondue parce que chacun les entendait parler dans sa propre langue.
Ils étaient tous dans l'étonnement et la surprise, et ils se disaient les uns aux autres: Voici, ces gens qui parlent ne sont-ils pas tous Galiléens? Et comment les entendons-nous dans notre propre langue à chacun, dans notre langue maternelle? Parthes, Mèdes, Élamites, ceux qui habitent la Mésopotamie, la Judée, la Cappadoce, le Pont, l'Asie, la Phrygie, la Pamphylie, l'Égypte, le territoire de la Libye voisine de Cyrène, et ceux qui sont venus de Rome, Juifs et prosélytes, Crétois et Arabes, comment les entendons-nous parler dans nos langues des merveilles de Dieu?

Méditation du Père Lev Gillet


Texte extrait du livre "L'an de grâce du Seigneur" du Père Lev Gillet ("Un moine de l'Eglise d'orient") aux éditions du Cerf


«Voici que nous célébrons la fête de la Pentecôte, la venue de l'Esprit, l' accomplissement de la promesse ainsi que de notre espérance ». C'est en ces termes que l'Eglise, aux vêpres de la Pentecôte, le samedi soir, nous invite à entrer dans l'atmosphère de cette très grande fête que nous célébrons le septième Dimanche après Pâques et qui n'est pas inférieure à Pâques elle-même.
Au cours de ces vêpres du samedi soir avant la Pentecôte, trois lectures de l'Ancien Testament nous préparent à la fête. La lecture du livre des Nombres nous montre Moïse choisissant, sur l'ordre de Dieu, soixante-dix anciens auxquels Dieu communiqua une part de l'esprit qu'il avait donné à Moïse. Ils se tenaient près du tabernacle, «quand l'Esprit reposa sur eux, ils prophétisèrent...». Et, quand Josué demanda à Moïse de réduire au silence deux hommes qui prophétisaient sans être venus vers le tabernacle, Moise répondit : «Serais-tu jaloux pour moi ? Ah , Puisse tout le peuple de Yahvé être prophète, Yahvé leur donnant son Esprit !». La lecture du prophète Joël prédit ce qui arriva lors de la première Pentecôte chrétienne : «Après cela je répandrai mon Esprit sur toute chair. Vos fils et vos filles prophétiseront, vos anciens auront des songes, vos jeunes gens, des visions. Même sur les esclaves, hommes et femmes, en ces jours-là, je répandrai mon Esprit». La lecture du prophète Ezéchiel annonce elle aussi un renouvellement intérieur : «... Je vous donnerai un coeur nouveau, je mettrai en vous un esprit nouveau; j'ôterai de votre chair le coeur de pierre et je vous donnerai un coeur de chair. Je mettrai mon esprit en vous...».
Aux matines de la Pentecôte, chantées le samedi soir ou le Dimanche matin, nous lisons un des évangiles racontant les apparitions de Jésus ressuscité. Dans ce passage (]ean 20:19-31), nous voyons une première descente de l'Esprit sur les disciples : «... Il []ésus] souffla sur eux et leur dit : Recevez l'Esprit Saint...". Cette première venue de l'Esprit n'est pas moins réelle que celle du jour de la Pentecôte. La différence est que, le jour de la Pentecôte, l'Esprit descendit sur eux avec «puissance». Il y a la même différence entre la venue du Saint-Esprit sur un chrétien baptisé, au moment où il reçoit le sacrement de chrismation ou confirmation, et ce baptême de l'Esprit dont nous reparlerons et que certains chrétiens obtiennent à un stade avancé de la vie spirituelle.
A la liturgie, le Dimanche matin, nous lisons, au lieu d'épître, le récit des événements de la Pentecôte tels que les décrit le livre des Actes des Apôtres (2 :1-11). Certains aspects de ce récit appellent particulièrement notre attention.
«Le jour de la Pentecôte étant arrivé...». La Pentecôte est à la fois un achèvement et un début. Une voie nouvelle s'ouvrait devant les disciples, mais ils s'y étaient préparés. Nous ne pouvons pas entrer en quelque sorte dans la Pentecôte à l'improviste. Il nous faut d' abord avoir assimilé toute la substance spirituelle que nous offrent les cinquante jours compris entre Pâques et Pentecôte. Il nous faut déjà avoir eu l'expérience du Christ ressuscité. Il faut avoir traversé les jours de la Passion. Bref, il faut avoir mûri.

«Ils se trouvaient tous ensemble...». Quelques autres versets du livre des Actes nous dépeignent les Onze, assemblés «dans la chambre haute», avec Marie, mère de Jésus et les femmes. C'était l'Eglise naissante. Ils priaient tous ensemble. Nous trouvons là les conditions nécessaires à la réception du Saint-Esprit. Il nous faut, à certains moments, nous retirer du monde et nous enclore dans la chambre haute de notre âme. Là nous devons prier. Et nous devons nous unir à la prière et à la foi de toute l'Eglise. Nous devons être «ensemble» avec les apôtres et avec la mère de Jésus. Qui veut ignorer l' autortté des apôtres ou se passer de la présence maternelle de Marie ne peut recevoir le Saint-Esprit.
«Quand, tout à coup, vint du ciel un bruit comme celui d'un violent coup de vent... ». Le Saint-Esprit est un souffle, un vent. Ce qui importe pour nous, ce n'est pas de nous émerveiller devant la puissance de ce souffle, mais de nous soumettre entièrement à lui et de nous laisser «pousser» par l'Esprit comme Jésus aux jours de sa vie terrestre. Que ce souffle nous dirige où il veut. Rappelons-nous aussi que ce souffle est lui-même "dirigé". Il n'est pas une force indépendante et incohérente. Jésus a soufflé le Saint-Esprit sur ses disciples. Mais ce souffle procède d'abord de la bouche du Père. Il est une obéissance à Dieu. En obéissant aux impulsions de l'Esprit (le vent bruyant n'est qu'un symbole extérieur et rare, l'impulsion intérieure est la réalité), nous participons à l'obéissance de l'Esprit lui-même, procédant Pu père, envoyé par le Fils.
«Ils virent apparaître des langues qu'on eût dites de feu; elles se divisaient et il s'en posa une sur chacun d'eux». Le Saint-Esprit apparaît sous la forme de langues. La Pentecôte remédie à la dispersion et confusion des langues, produit de l'effort orgueilleux de la tour de Babel. Elle rétablit l'unité du langage humain. Les disciples seront compris par tous les étrangers venus à Jérusalem, Parthes, Mèdes et Cappadociens, et ceux-ci s'étonneront d'entendre comme dans leur propre langue les discours de ces Galiléens. Le langage de l'Esprit - du moins son sens intérieur - est aujourd'hui encore accessible à tous les hommes, à toutes les races, à toutes les nations; le même Esprit transmet un message universel, que chaque âme reconnait cependant comme le sien propre. D' autre part, encore de nos jours, celui en qui le Saint-Esprit agit devient capable, sinon de s' exprimer en langues étrangères, du moins de trouver la «langue» psychologique qui aura une résonance chez chacun et ouvrira son coeur. Le «dialogue» devient ainsi possible. Ce sont des langues de feu qui se posèrent sur les disciples. Ces langues impliquent une charité brûlante. La parole semble conditionnée par la flamme. Enfin les langues sont également distribuées. Elles ne sont pas le privilège de Pierre, ou de Marie, ou des Onze. Elles se posent sur tous ceux qui sont présents dans la chambre haute, et cependant ces langues enflammées sont un seul et même feu. Ainsi se trouve résolu dans l'Eglise le problème de l'unité et des personnes. Ni l'une ni les autres ne sont sacrifiées.
«Tous furent alors remplis de l'Esprit Saint...». Cette soudaine et complète invasion de l' âme entière par le Saint-Esprit, accompagnée d'une force nouvelle, extraordinaire, constitue le «baptême du Saint-Esprit», différent à la fois du baptême d' eau et de l' onction par laquelle l'Eglise communique l'Esprit. Il y a là une réalité que nous avons trop perdue de vue, mais sur laquelle l'Ecriture insiste et vers laquelle notre attention devrait être rappelée .
«Et ils commencèrent à parler en d'autres langues, selon que l'Esprit leur donnait de s'exprimer...». Nous avons déjà indiqué l'importance de cette parole «donnée» par l'Esprit . Mais, d'une manière plus générale, ici se pose la question des grâces extraordinaires ou pentecostales, des charismes . Un danger serait de les désirer d' une manière désordonnée. Un autre danger serait de les négliger, de les oublier, de penser que ce sont là choses du passé, alors qu'ils ont été donnés - ou plutôt qu'ils sont donnés - à l'Eglise pour tous les temps.
L'évangile du dimanche de la Pentecôte (Jean 7:37-52, 8:12) relate les discussions entre Juifs relativement à la personne de Jésus. Seuls les trois premiers versets ont un rapport direct avec le Saint-Esprit : «Jésus debout, lança à pleine voix : si quelqu'un a soif, qu'il vienne à moi et qu'il boive, celui qui croit en moi, selon le mot de l'Ecriture, de son sein couleront des fleuves d'eau vive. Il parlait de l'Esprit que devaient recevoir ceux qui croient en lui; car ils n' avaient pas encore l'Esprit, parce que Jésus n'avait pas encore été glorifié». Le sens de ces paroles est clair. D'une part, l'effusion du Saint-Esprit est conditionnée par la foi en Jésus. D'autre part, le Saint Esprit sera donné quand la présence visible de Jésus aura été retirée de ce monde. Ce sont là les deux points fondamentaux de la doctrine des rapports du Fils et de l'Esprit dans la vie des chrétiens.
Aussitôt après la liturgie commencent des vêpres d'une structure spéciale. Au cours de cet office, la congrégation, agenouillée, chante d'une manière solennelle le tropaire «Roi du ciel, Consolateur, Esprit de vérité, toi qui es partout présent et qui remplis tout...». On sait que ce tropaire est dit au début de chaque liturgie et de la plupart des offices du rit byzantin; et il est, si nous ne faisons pas erreur, la seule prière adressée directement, dans ce rit, au Saint-Esprit. Cette prière, le matin du Dimanche de la Pentecôte, a une importance capitale : son chant est le moment où l'Eglise concentre toutes ses aspirations vers l'Esprit et implore sa venue; à ce moment, chaque fidèle agenouillé peut, s'il demande vraiment Celui qui est le «don» par excellence, recevoir dans son coeur un renouvellement de la grâce Pentecostale et la descente de la Colombe. La congrégation étant encore agenouillée, le prêtre lit sept longues prières; deux d'entre elles sont adressées à Dieu, sans distinction entre les trois personnes divines; deux sont adressées au Père et trois au Fils. Elles peuvent, au premier abord, sembler un peu diffuses; mais, si on les analyse attentivement, on reconnaitra en elles une somme de la doctrine orthodoxe. Elles récapitulent toute l'économie divine du salut; elles indiquent tout ce que Dieu a fait pour les hommes depuis la création et elles sollicitent les grâces dont nous avons besoin. Quoiqu' elles fassent certaines allusions au Saint-Esprit, elles marquent un glissement du mystère de l'Esprit au mystère de la Trinité. Une phrase de la cinquième de ces prières dit : «O toi, qui, le dernier et grand jour de notre salut, celui de la Pentecôte, nous as révélé le mystère de la Sainte Trinité, consubstantielle et éternelle...». Cet aspect «trinitaire» de la fête de la Pentecôte explique pourquoi ce Dimanche est souvent appelé, parmi les peuples orfllodoxes, «jour de la Trinité ». Il explique aussi pourquoi les Eglises de rit byzantin ont jugé bon de consacrer plus spécialement le lundi de la Pentecôte à la personne du Saint-Esprit : la liturgie et la plus grande part de l'office de la veille (sauf les sept prières dont nous avons parlé) sont répétées en ce lundi. A vrai dire, nommer, comme on le fait, le lundi de la Pentecôte «jour du Saint-Esprit» est une anomalie, car la vraie fête du Saint-Esprit est le dimanche de la Pentecôte, et il serait certainement souhaitable que, en ce Dimanche même, la piété des fidèles s'adresse très particulièrement à la troisième personne de la Trinité, dont l'existence et l'action demeurent si voilées à beaucoup d' entre nous. D' autre part, il est bon que le mystère de la Trinité soit aussi rappelé à notre attention. Ce serait une grande erreur que de considérer le dogme de la Trinité comme une spéculation abstraite, lointaine, sans rapport avec notre vie pratique. L'amour vivant et réciproque des trois Personnes divines est le fait éternel, le fait le plus grand, infiniment plus grand et important que tout ce qui nous concerne nous-mêmes. L'homme a été créé parce que les trois Personnes divines voulaient lui communiquer dans une certaine mesure leur propre vie intime. Déjà ici-bas, la vie de la grâce est une participation à cette vie de la Trinité. L'âme qui meurt unie à Dieu est appelée à entrer dans la circulation d' amour des trois Personnes. Les relations de celles-ci constituent le modèle suprême, quoiqu'infiniment transcendant, de ce que devraient être les relations entre les hommes. La Pentecôte, événement final de l'histoire de notre salut - puisque la dispensation du Saint-Esprit ne sera, en ce monde suivie d' aucune dispensation supérieure ou nouvelle - nous introduit au sein du mystère de la Trinité, océan d'où part et où aboutit le fleuve de l'amour divin qui emporte res hommes vers Dieu.
Afin de marquer que, à la Pentecôte, le cycle liturgique a atteint sa plénitude, l'Eglise orthodoxe appelle tous les Dimanches qui suivent «Dimanches après la Pentecôte». Elle continue même de les désigner ainsi jusqu'au premier Dimanche de la préparation au grand Carême. Il en résulte, à partir du début de l' année liturgique (1er septembre), un curieux dédoublement entre la série des dimanches, qui se rattachent d'une certaine manière à la Pentecôte, au temps de la plénitude, et les fêtes de NotreSeigneur (Avent, Noël, Epiphanie), temps d'attente, de naissance et de croissance. En fait, la piété des fidèles saura, au cours des cinq ou six premiers mois de l'année liturgique, mettre spirituellement les dimanches en rapport avec le mystère du Christ attendu, apparaissant et grandissant au milieu des hommes. Par contre, il est bon que, de la Pentecôte à la fin de l' année liturgique, nous sachions maintenir les dimanches dans le cadre du «temps après la Pentecôte» ou plutôt du «temps de la Pentecôte», lequel durera jusqu' au commencement de septembre. Nous célèbrerons ces dimanches dans l' esprit de la Pentecôte. Nous lirons, aux liturgies de ces Dimanches des épisodes évangéliques bien antérieurs à la Pentecôte; ils se rattachent à la vie terrestre de Jésus avant sa Passion et sa glorification. Mais nous les interprèterons en termes de l'Esprit, car c'est sous le souffle et par la puissance du Saint-Esprit que Jésus parlait et agissait.

Nous avons déjà souligné l'importance du thème de la lumière dans l' année liturgique byzantine : cette lumière divine apparaît avec la naissance du Christ; elle croît avec lui; elle triomphe sur les ténèbres la nuit de Pâques; à la Pentecôte, elle atteint le plein midi. La Pentecôte est "la flamme du midi". Mais à ce développement exprimé par l' année liturgique doit correspondre dans notre âme une croissance de la lumière intérieure. Les richesses et le symbolisme de l' année liturgique ne servent de rien si elles n'aident pas "la lumière intérieure" à guider notre vie.
Nous avons dit aussi que l' on pourrait discerner dans la vie spirituelle trois étapes comparables à trois conversions. La première conversion est la rencontre de l'âme avec Notre-Seigneur, suivi comme un Ami et comme utt Maître. La deuxième conversion est l' expérience personnelle du pardon et du salut, de la croix et de la résurrection. La troisième conversion est la venue du Saint-Esprit dans l' âme comme une flamme et une force. C' est elle qui établit l'homme dans une union durable avec Dieu. Noël ou l'Epiphanie, puis Pâques et enfin la Pentecôte correspondent à ces trois conversions. Hélas, il est probable que nous n'avons pas encore été transformés en flamme vive par les Pentecôtes déjà nombreuses auxquelles, chaque année, nous nous sommes liturgiquement associés. Du moins est-il bon que nous ne perdions jamais de vue quelles grâces, quelles possibilités chaque Pentecôte nous apporte.

Texte extrait du livre "L'an de grâce du Seigneur" du Père Lev Gillet ("Un moine de l'Eglise d'orient") aux éditions du Cerf

Tropaire
TU ES BÉNI Ô CHRIST NOTRE DIEU TOI QUI REMPLIS DE SAGESSE LES PÊCHEURS DU LAC LEUR ENVOYANT L’ESPRIT SAINT PAR EUX TU PRIS AU FILET L’UNIVERS GLOIRE À TOI Ô AMI DES HOMMES

Kondakion
LORSQU’IL DESCENDIT POUR CONFONDRE LES LANGUES, LE TRÈS-HAUT DISPERSA LES GENTILS ; LORSQU'IL PARTAGEA LES LANGUES DE FEU, IL NOUS A TOUS APPELÉS À L'UNITE. D'UNE SEULE VOIX LOUONS LE TRÈS SAINT-ESPRIT.