16 juillet 2006

Le démoniaque gérasénien


Vème dimanche après la Pentecôte
St Luc VIII. 27-39



27 Lorsque Jésus fut descendu à terre, il vint au-devant de lui un homme de la ville, qui était possédé de plusieurs démons. Depuis longtemps il ne portait point de vêtement, et avait sa demeure non dans une maison, mais dans les sépulcres.


28 Ayant vu Jésus, il poussa un cri, se jeta à ses pieds, et dit d'une voix forte: Qu'y a-t-il entre moi et toi, Jésus, Fils du Dieu Très Haut ? Je t'en supplie, ne me tourmente pas.
29 Car Jésus commandait à l'esprit impur de sortir de cet homme, dont il s'était emparé depuis longtemps; on le gardait lié de chaînes et les fers aux pieds, mais il rompait les liens, et il était entraîné par le démon dans les déserts.
30 Jésus lui demanda: Quel est ton nom? Légion, répondit-il. Car plusieurs démons étaient entrés en lui.
31 Et ils priaient instamment Jésus de ne pas leur ordonner d'aller dans l'abîme.
32 Il y avait là, dans la montagne, un grand troupeau de pourceaux qui paissaient. Et les démons supplièrent Jésus de leur permettre d'entrer dans ces pourceaux. Il le leur permit.
33 Les démons sortirent de cet homme, entrèrent dans les pourceaux, et le troupeau se précipita des pentes escarpées dans le lac, et se noya.
34 Ceux qui les faisaient paître, voyant ce qui était arrivé, s'enfuirent, et répandirent la nouvelle dans la ville et dans les campagnes.
35 Les gens allèrent voir ce qui était arrivé. Ils vinrent auprès de Jésus, et ils trouvèrent l'homme de qui étaient sortis les démons, assis à ses pieds, vêtu, et dans son bon sens; et ils furent saisis de frayeur.
36 Ceux qui avaient vu ce qui s'était passé leur racontèrent comment le démoniaque avait été guéri.
37 Tous les habitants du pays des Géraséniens prièrent Jésus de s'éloigner d'eux, car ils étaient saisis d'une grande crainte. Jésus monta dans la barque, et s'en retourna.
38 L'homme de qui étaient sortis les démons lui demandait la permission de rester avec lui. Mais Jésus le renvoya, en disant:
39 Retourne dans ta maison, et raconte tout ce que Dieu t'a fait. Il s'en alla, et publia par toute la ville tout ce que Jésus avait fait pour lui.


Un moine de l’Eglise l’Occident

Chers frères et sœurs,

Le passage d’Evangile de ce dimanche a d’une certaine manière un aspect purement résurrectionnel.
Oui; une vie dominée par l’esprit du mal n’est-elle pas un tombeau ? Et toute délivrance quelle qu’elle soit n’est-elle pas une forme de résurrection ?

Il s’agit dans ce récit de la première incursion du Christ en terre païenne, et dès l’abord il s’y heurte au démon.
Le possédé nous apparaît comme un terrible symbole de son œuvre : violence sur-humaine rejetant toute entrave humanité dépouillée, existence déchirée réduite au cri et aux gémissements...
Il nous est dit que ce démoniaque s’est lui-même exclu de la ville, préférant se condamner à vivre dans le désert, lieu traditionnellement et symboliquement attribué aux démons.

L’initiative de la rencontre entre le possédé et le Seigneur vient du possédé lui-même ; d’emblée il reconnaît la supériorité du Christ en se prosternant devant lui et le dialogue s’instaure.
Osons dire que la prière s’instaure ; dans le sens où, en effet, tout dialogue entre l’homme et Dieu est prière.
« Quel est ton nom ? » demande le Christ voulant ainsi saisir le nom ; c’est-­à-dire avoir prise sur l’être même.
« légion » répond le possédé.
Comprenons par « légion» le grand nombre de démons auxquels le malade était asservi. Le mot « légion » évoque aussi l’armée, la guerre ; et à travers le possédé ce qui barre le chemin à Jésus quand Il débarque en pays païen ; c’est l’armée du prince de ce monde qui se considérait là-bas ; en cet instant comme en terrain conquis. Mais c’est sans compter sur la force vivifiante et salvatrice du Christ ! Pas plus que lors de son dernier affrontement avec satan à Géthsémani Il n’a besoin d’appeler à son renfort les légions d’anges ; Il vaincra seul le démon.

Dans les lignes que nous venons d'entendre nous avons la nette impression que ce qui torture le démon c'est la simple et seule mise en présence du Christ en tant que Fils de Dieu avec qui tout mal est absolument incompatible.
La retraite de cette maudite légion démoniaque dans le troupeau de porcs ­- bêtes considérées comme impures - puis dans la mer, préfigure la victoire encore à venir ; libérant la terre entière de l'impureté satanique. Le diable ne pouvant qu'être une puissance qui mène sur la pente, c'est-à-dire jusqu'à la mort.

La guérison et donc la libération obtenues, l'ancien démoniaque se retrouve assis aux pieds de Jésus, comme un disciple, vêtu dans son bon sens ; à l'inverse de l'instabilité, de la nudité, de l'aliénation où le démon l'avait réduit.

Et bien chers frères est sœurs, n'avons-nous pas là, dans cette histoire du possédé gérasénien une petite théologie du sacrement de pénitence ?

Si ce sacrement est communément appelé « confession »c'est qu'à l'instar de ce démoniaque (et avant même l'aveu de nos fautes) ; par la simple confession de notre foi en la Personne de Jésus, Fils du Dieu Vivant, nous recevons la guérison, la délivrance et l'apaisement intérieur.

Qui que nous soyons, en nous préparant à la confession ayons en mémoire l'évangile d'aujourd'hui : unifions notre esprit et notre vie (aussi bien personnelle que familiale paroissiale...) en nous souvenant de l'Amour infini du Christ qui dans Son extrême humilité s'est abaissé à aller en terre étrangère à la rencontre des plus perdus et qui aujourd'hui n'a de cesse de frapper à la porte de notre cœur, de vouloir faire Sa demeure en nous...pour autant que nous lui ouvrions!

Pour nous y aider prenons comme support pour notre prière personnelle ces versets du psaume 3 :

« Seigneur ils sont nombreux ceux qui se lèvent contre moi ; nombreux ceux
qui disent à mon âme : 'Point de salut pour lui en son Dieu !'
Mais toi Seigneur tu me prends avec moi, tu es ma gloire, Celui qui me relève la tête. Au Seigneur appartient le salut et sur son peuple est la bénédiction ! »

...et ajoutons la demande que nous soit accordée la grâce d'unifier nos cœurs « afin que dans un même esprit nous confessions le Père, le Fils et le Saint Esprit ! »

Amen !