25 décembre 2006

La Nativité





Les Pères et la Nativité

Textes liturgiques

Proto évangile de Jacques

Regardons l'icône .... explications

Homélie de St Jean Chrysostome

Icône de la Nativité de Patmos




Evangile de la Liturgie ( Matthieu II, 1-12)

Jésus étant né à Bethléem de Judée, au temps du roi Hérode, voici que des mages venus d'Orient arrivèrent à Jérusalem en disant : "Où est le roi des Juifs qui vient de naître? Nous avons vu, en effet, son astre à son lever et sommes venus lui rendre hommage".
L'ayant appris, le roi Hérode s'émut, et tout Jérusalem avec lui. Il assembla tous les grands prêtres avec les scribes du peuple, et il s'enquérait auprès d'eux du lieu où devait naître le Christ.
"A Bethléem de Judée, lui dirent-ils; ainsi, en effet, est-il écrit par le prophète : "Et toi, Bethléem, terre de Juda, tu n'es nullement le moindre des clans de Juda ; car de toi sortira un chef qui sera pasteur de mon peuple Israël".


Alors Hérode manda secrètement les mages, se fit préciser par eux le temps de l'apparition de l'astre, et les envoya à Bethléem en disant :"Allez vous renseigner exactement sur l'enfant ; et quand vous l'aurez trouvé, avisez-moi, afin que j'aille, moi aussi, lui rendre hommage".
Sur ces paroles du roi, ils se mirent en route ; et voici que l'astre, qu'ils avaient vu à son lever, les précédait jusqu'à ce qu'il vînt s'arrêter au-dessus de l'endroit où était l'enfant. A la vue de l'astre ils se réjouirent d'une très grande joie.
Entrant alors dans le logis, ils virent l'enfant avec Marie sa mère, et, se prosternant, ils lui rendirent hommage ; puis, ouvrant leurs cassettes, ils lui offrirent en présents de l'or, de l'encens et de la myrrhe.
Après quoi, avertis en songe de ne point retourner chez Hérode, ils prirent une autre route pour rentrer dans leur pays.



Méditation du Père Lev
Texte extrait du livre "L'an de grâce du Seigneur" du Père Lev Gillet ("Un moine de l'Eglise d'orient") aux éditions du Cerf

Qu'on nous permette de réfléchir à quelques unes des paroles évangéliques que l'Eglise propose à notre attention durant cette fête.
« Les bergers se dirent : Allons à Bethléem et voyons ce qui est arrivé et que le Seigneur nous a fait connaître ». Nous aussi, allons jusqu'à Bethléem. Montons en esprit sur cette colline, « vers les monts d'où viendra mon secours ». L'ascension vers Bethléem implique un effort; mais laisserons-nous passer une si grande occasion ?
« Joseph, lui aussi, quittant la ville de Nazareth en Galilée, monta en Judée, à la ville de David, appelée Bethléem... afin de s'y faire inscrire avec Marie, sa fiancée, qui était enceinte...». Non plus César Auguste mais le Roi des rois veut « le recensement de toute la terre... chacun dans sa ville ». Chacun doit déclarer avec sincérité quelle cité il choisit, à quel groupe il se rattache. Certains choisissent Rome; d' autres choisissenl Athènes. Choisirai-je la richesse, le pouvoir, l'intelligence ? Non. Ces villes ne sont pas pour moi. Je ne choisira même pas Jérusalem, le lieu où Dieu manifeste sa gloire. Pendant ma vie terrestre, je veux être un citoyen de Bethléem; je veux que cette humilité et cette pauvreté soient ma part; je veux, avec Marie, avec Joseph, avec Jésus, que mon nom soit inscrit dans la bourgade méprisée ou inconnue des hommes, mais si grande devant Dieu.


«Voici que je vous annonce une grande joie... aujourd'hui, il vous est né un Sauveur...». La naissance de Jésus à Bethléem n'est pas un lointain événement historique qui ne me concerne point. Et, si elle me concerne, ce n'est pas seulement parce que je suis membre de la grande collectivité humaine. Le message de Noël n'est pas adressé à l'humanité en général. Il est adressé en particulier à chaque homme. Il atteint chaque âme d'une manière unique et exceptionnelle. C'est à moi - autrement qu'à tout autre homme - que cette joie est annoncée; c' est à moi et pour moi qu'un Sauveur est né. Reconnaissons dans la Nativité du Christ un don très personnel. Recevons ce don avec foi et reconnaissance.
«Et voici que l'astre, qu'ils avaient vu à l'Orient, les devançait jusqu'à ce qu'il vint s'arrêter au-dessus de l'endroit où se trouvait l' enfant ».
Les mages ont fidèlement suivi la lumière qui leur avait été donnée; étant dociles à cette lumière, ils ont été conduits par elle jusqu'à l'enfant. Si je m'efforce d'être fidèle à toute la mesure de lumière que Dieu m'accorde, si j'ai le courage de tout quitter pour suivre l'étoile, si je décide d'être vrai, obéissant à ma conscience (quoiqu'il puisse arriver), prêt « à rendre témoignage à la lumière... la lumière véritable qui éclaire tout homme venant dans ce monde », la lumière divine ne manquera pas, malgré mon ignorance, de me conduire - non d'une manière abstraite, mais dans toutes les circonstances concrètes de la vie, et chaque fois que cela sera nécessaire- jusqu'auprès de l'enfant en qui j'ai mis tout mon espoir.
«Elle mit au mande son fils premier-né, l'enveloppa de langes et le coucha dans une crèche, parce qu'il n'y avait pas de place pour eux dans l'hôtellerie ». La naissance dans une crèche déclare que Jésus veut être compté parmi les plus pauvres, parmi les plus humbles ; on le trouvera parmi les déshérités, les malades, les prisonniers, les pécheurs. Je désire être pauvre avec Jésus plutôt qu'être riche sans Jésus. Je préfère habiter dans une caverne, avec Jésus, Marie et Joseph, plutôt que dans l'hôtellerie où il n'y a pas de place pour eux. Nous devons d'ailleurs accepter le fait que, pour quiconque aime Jésus, il n'y a pas de place en ce monde. "Le Fils de l'homme n'a pas où reposer sa tête ».
« Et ceci vous servira de signe : vous trouverez un enfant enveloppé de langes...». Je cherche un Dieu et un Seigneur, et je trouve un tout petit enfant. Le message de Noël est un message d'enfance : « En vérité, je vous le dis, quiconque n' accueille pas le Royaume de Dieu en petit enfant n'y entrera pas ». Dieu ne nous demande pas de renoncer à la connaissance et à la prudence adultes nécessaires à l' accomplissement de nos tâches terrestres. Mais il veut que, dans nos rapports avec lui, nous revenions à la simplicité confiante de l'enfant. L'enfant a foi dans son père; il marche avec lui, la main dans la main; il sait que son père le conduit où il faut, il sait que son père le défendra, le nourrira, l'abritera; il se laisse mener par son père, les yeux fermés, sans aucune inquiétude. Quand il parle à son père, il ne cherche pas des formules compliquées. Il dit tout simplement et affectueusement ce qu'il désire dire. Et voilà ce que symbolise pour nous le petit enfant de Bethléem. D'autre part, l'enfance de Jésus est plus qu'un modèle à imiter. elle est un des mystères de la vie du Sauveur qui, bien' qu' ayant un aspect historique et transitoire, ont aussi une réalité éternelle. Noël est le temps favorable pour honorer le mystère de l'enfance de Jésus.
« Ils virent l'enfant avec Marie, sa mère, et tombant à genoux, ils l'adorèrent; puis ouvrant leurs cassettes, ils lui offrirent en présent de l' or, de l'encens et de la myrrhe ». Comme les mages. nous ouvrons nos trésors et nous offrons au petit enfant ce qu'il y a de plus précieux. Nous offrons en esprit l'or, signe de la souveraineté de Jésus sur toutes les richesses et toutes les choses créées, signe aussi de notre propre détachement des biens temporels. Nous offrons en esprit l'encens, signe de l'adoration, car Jésus n'est pas seulement le roi de l'univers, mais il est notre Dieu. Nous offrons en esprit la myrrhe, aromate par lequel nous honorons d' avance la mort et la sépulture de Jésus, et par lequel aussi nous représentons notre renoncement aux jouissances corporelles. Seigneur Jésus, accepte mon offrande.
«Puis les bergers s'en retournèrent, glorifiant et louant Dieu pour tout ce qu'ils avaient vu et entendu...». Seigneur Jésus, fais que nous ne quittions pas Bethléem, fais que nous n'achevions pas cette fête de la Nativité sans avoir vu quelque chose de ce que les bergers ont vu, sans avoir entendu quelque chose de ce qu'ils ont entendu, sans avoir reçu dans nos c÷urs le message qui nous est prêché de la crèche.

« Vous êtes le corps du Christ, et membres chacun pour sa part». La fête de Noël est la fête du Corps mystique, car c'est par l'Incarnation que les hommes sont devenus membres du Christ. Quelque interprétation théologique que nous donnions à cette grande affirmation scripturaire et patristique de notre incorporation au Christ, nous devons croire qu'avec l'Incarnation a commencé, dans la chair humaine, entre JésusChrist et les hommes, une union ineffable et dépassant tout entendement. Au-delà de l'événement historique particulier qui se produit à Bethléem et par lequel le Fils de Dieu revêt un corps humain visible, un autre événement se produit, qui intéresse ia race humaine toute entière : Dieu, s'incarnant, épouse et revêt d'une certaine manière la nature humaine dont nous sommes participants et crée, entre lui et nous, une relation qui, sans cesser d'être celle de Créateur à créature, est aussi celle du corps aux membres. Il y a union sans confusion. Noël nous permet de prendre le plus profondément conscience de ce qu' est notre propre nature, la nature humaine, régénérée par Jésus-Christ.
«Et le verbe s'est fait chair ». Ce mot résume et exprime excellemment la fête de Noël. Si nous lui donnons tout son sens, nous comprendrons qu'il ne s'agit pas seulement ici du mystère par lequel le Fils et la Parole du Père est devenu homme. Cette même formule a aussi une implication d'ordre moral et pratique. Notre chair est souvent pour nous une occasion de tentation et de péché. Que la Parole de Dieu devienne donc chair en nous, qu'elle entre donc dans notre corps. Que la force de cette Parole (car il ne saurait être question d'une Incarnation substantielle) passe de l'extérieur à l'intérieur, passe dans nos membres. Alors la loi de l'Esprit l'emportera sur la loi de la chair. Noël n'aura pour nous un sens réel que si notre propre chair devient transformée, mue et dominée par la Parole faite chair.

Texte extrait du livre "L'an de grâce du Seigneur" du Père Lev Gillet ("Un moine de l'Eglise d'orient") aux éditions du Cerf

Tropaire
TA NAISSANCE, Ô CHRIST NOTRE DIEU, A FAIT RESPLENDIR DANS LE MONDE LA LUMIÈRE DE LA CONNAISSANCE EN ELLE LES SERVITEURS DES ASTRES ENSEIGNÉS PAR L’ÉTOILE APPRENNENT À T’ADORER TOI SOLEIL DE JUSTICE, ET À TE CONNAITRE ORIENT D’EN-HAUT, SEIGNEUR GLOIRE A TOI.

Kondakion
LA VIERGE AUJOURD’HUI MET AU MONDE
L’ÉTERNEL
ET LA TERRE OFFRE UNE GROTTE À L’INACCESSIBLE LES ANGES ET LES PASTEURS LE LOUENT ET LES MAGES AVEC L’ÉTOILE S’AVANCENT CAR TU ES NÉ POUR NOUS PETIT ENFANT DIEU ÉTERNEL.




Saint Jean Chrysostome
HOMÉLIE POUR LA NATIVITÉ DE NOTRE-SEIGNEUR JÉSUS-CHRIST.

Tome VI, p. 579-585

AVERTISSEMENT.

L'homélie sur la fête de Noël est citée par saint Cyrille d'Alexandrie sous le nom de saint Chrysostome et une partie de ce que ce Père en a cité se trouve dans les actes du concile d'Ephèse. Malgré un témoignage si positif; on a cependant émis des doutes sur l'authenticité de cette homélie telle que nous l'avons. Ces doutes se fondent sur ce que saint Cyrille, dans sa citation, rapporte à la sainte Vierge les paroles suivantes : Elle embrasse le Soleil de justice qui ne peut être circonscrit, tandis que dans notre homélie, elles sont dites de Béthléem. C'est sur ce fondement que Tillemont ne veut voir dans le morceau suivant qu'un centon formé de passages empruntés tantôt à saint Chrysostome, tantôt à saint Athanase : quoi qu'il en soit, homélie ou centon, la pièce est fort belle et ne manque ni de suite dans les idées, ni d'unité dans le style.




Je vois un mystère nouveau et admirable ; la voix des pasteurs retentir à mes oreilles, non semblable aux accords agrestes du chalumeau, mais au chant des hymnes célestes. Les anges chantent, les archanges font entendre leurs accords et les chérubins leurs cantiques, les séraphins rendent gloire, tous célèbrent cette fête dans laquelle ils contemplent un Dieu sur la terre et l'homme dans les cieux, Celui qui était élevé abaissé par son incarnation et celui qui était abaissé élevé par la miséricorde. Aujourd'hui, Béthléem imite le ciel: les astres de son firmament sont les anges qui chantent leurs cantiques; son soleil est le Soleil de justice qui ne peut être circonscrit. Et ne cherchez pas comment cela a pu être accompli, car lorsque Dieu veut, l'ordre de la nature doit céder. Il a voulu , il a eu la puissance, il est descendu , il nous a sauvés : la volonté de Dieu s'accomplit en toutes choses.

Aujourd'hui, Celui qui est prend naissance, Celui qui est devient ce qu'il n'était pas. Etant Dieu, il devient homme et n'abandonne pas sa divinité. Car, ce n'est point par la perte de sa divinité qu'il devient homme, ni par addition de qualité que d'homme il devient Dieu ; mais il est le Verbe, et, sa nature demeurant la même à cause de son immutabilité, il s'est fait chair. Mais lorsqu'il vint à naître, les Juifs refusaient de croire à cet enfantement merveilleux, les pharisiens interprétaient à (580) contre-sens les livres sacrés, les scribes enseignaient le contraire de la loi, enfin Hérode cherchait Celui qui venait de naître non pour l'honorer, mais pour le faire périr.
Dans ce jour, tout ce qu'ils voyaient était contradiction. « Car, » ainsi que le dit. le Psalmiste, « ces choses n'ont point été cachées à leurs fils dans la génération suivante. » (Ps. LXXVII, 4.) Des rois arrivèrent, et c'était pour vénérer le roi céleste qui venait sur la terre, non pas accompagne des anges, des archanges, des trônes, des dominations, des puissances, des vertus; mais parcourant un chemin nouveau, une route non frayée, et sortant d'un sein immaculé. Cependant, il n'abandonnait pas le gouvernement des légions célestes, ni ne se dépouillait de sa divinité lorsqu'il se faisait homme : les rois vinrent l'adorer comme le céleste Roi de gloire; les soldats le reconnurent comme le Seigneur des armées ; les femmes le vénérèrent comme né de la femme et changeant les douleurs de la femme en joie et en allégresse ; les vierges le proclamèrent comme fils d'une vierge. admirant que Celui qui a fait le lait et les mamelles et qui a donné au sein de la femme d'être une source intarissable reçoive d'une mère vierge la nourriture des petits enfants; les enfants l'ont vu devenir petit enfant afin que de la bouche des enfants et de ceux qui sont à la mamelle sortît fa louange parfaite; les enfants ont vu en lui l'enfant qui s'est servi de la fureur d'Hérode pour donner à leur âge la gloire du martyre ; les hommes faits ont reconnu Celui qui s'est fait homme pour apporter remède aux maux de ceux qui vivaient sous le joug; pour les pasteurs, il est le bon Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis; pour les prêtres, il est le souverain Pontife selon l'ordre de Melchisédech (Hébr. VII, 17 ; Ps. CIX, 4) ; pour les esclaves, il est Celui qui a pris la forme (le l'esclave afin (le nous racheter de la servitude (Philip. II, 7) ; pour les pécheurs, il est Celui qui a tiré de leurs filets ceux qui ont été envoyés pour ramener les hommes; pour les publicains, Celui qui a choisi un publicain afin d'en faire un évangéliste; pour les femmes de mauvaise vie, Celui dont les pieds furent arrosés (les larmes d'une courtisane; et, pour tout dire en un mot, les pécheurs ont pu voir en lui l'Agneau de Dieu qui efface les péchés du inonde; les mages lui ont fourni sa garde royale, les pasteurs font environné de leurs bénédictions, les publicains ont annoncé son Evangile, les courtisanes l'ont embaumé avec la myrrhe, la Samaritaine a eu soif de la source de vie qu'il fait connaître, et la Chananéenne a montré envers lui sa foi inébranlable.

Puisque tous se réjouissent ainsi, je veux aussi me réjouir, je veux former des choeurs, je veux célébrer une fête, mais je formerai des choeurs non en pinçant la cithare, non en agitant le thyrse, non en m'accompagnant de la flûte, noir en portant (les torches allumées, je veux, ni lieu d'instruments de musique, porter les langes du Christ. Ces langes sont mon espérance, ma vie, mon salut; ils me tiennent lieu de flûte et de cithare. C'est pourquoi je m'avance en les portant, afin que leur puissance soit toute la force de mon discours et que je puisse, dire avec fange : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux ! » avec les pasteurs « Et la paix sur la terre aux hommes de bonne volonté! » (Luc, II, 14.)

Aujourd'hui, celui qui est né du Père d'une manière ineffable est né de la Vierge, pour l'amour de moi, (l'une manière inexplicable et merveilleuse. II est né du Père, avant les siècles, conformément aux lois de sa nature et Celui qui fa engendré le sait ; aujourd'hui, il est né en dehors des lois de la nature et la grâce de l'Esprit-Saint en est témoin. Sa génération céleste est légitime et la génération terrestre ne l'est pas moins; il est vraiment le Dieu engendré de Dieu, il est vraiment homme né d'une vierge. Dans le ciel, il est le seul Fils unique d'un seul; sur la terre, il est le seul Fils unique d'une vierge seule. De même que dans sa génération céleste il serait impie de lui chercher une mère, de même dans sa génération terrestre ce serait un blasphème de lui chercher un père. Le Père a engendré sans écoulement de sa substance et la Vierge a enfanté sans connaître la corruption. Dieu n'a point souffert d'écoulement de sa substance, car il a engendré comme il convenait à un Dieu, et la Vierge n'a point connu la corruption lorsqu'elle enfantait, parce qu'elle a enfanté spirituellement (C'est-à-dire par l'opération du Saint-Esprit.).

D'où il suit que sa génération céleste. ne peut être expliquée par des paroles humaines et que sa venue dans le temps ne peut être le sujet de nos investigations. Je sais qu'une vierge a enfanté aujourd’hui, et je crois qu'un Dieu a engendré en dehors du temps; mais j'ai appris que le mode de cette génération doit être honoré par le silence et ne peut être l'objet d'une curiosité indiscrète. Car, lorsqu'il s'agit de Dieu, il ne faut pas nous arrêter à la nature des choses, mais croire à la puissance de Celui qui agit. C'est une loi de la nature qu'une femme mette au monde après qu'elle a contracté mariage; mais si une vierge, sans connaître le mariage. enfante et ensuite reste vierge, ceci est au-dessus de la nature. Que l'on scrute ce qui est conforme à la nature, j'y consens; mais on doit honorer par le silence ce qui est au-dessus de la nature, non parce qu'if faut s'éloigner de tels sujets, mais parce qu'ils sont ineffables et dignes d'être célébrés autrement que par des paroles.

Mais accordez-moi , je vous prie, la permission de mettre fin à ce discours dès l'exorde. Car , je redoute de m'élever jusqu'à cette région des choses dont il n'est point permis de parler et je ne sais de quel côté ni comment diriger le gouvernail. Que dirai-je, ou comment pourrai-je parler? Je vois une mère qui enfante, je contemple un fils mis au monde, mais j'ignore le mode de cette génération lorsque Dieu veut , la nature est vaincue, les limites de l'ordre établi dans la nature sont franchies. Rien n'arrive ici selon l'ordre de la nature, mais un miracle s'accomplit au-dessus des lois de la nature. La nature n'a point agi ; la volonté du Seigneur a opéré. O grâce qui surpasse tout langage ! Le Fils unique, qui est avant tous les siècles, que le sens du toucher ne peut atteindre, qui est simple, incorporel, a revêtu un corps mortel et visible comme le mien ! Et pour quelle cause, sinon pour que son aspect nous enseigne, et qu'ainsi enseignés il nous conduise par la main vers les choses invisibles? Parce que les hommes ont plus de confiance dans ce que leurs yeux voient que dans ce que leurs oreilles entendent, et qu'ils hésitent lorsqu'ils n'ont point vu, il a voulu parler aux yeux par le moyen de son corps, de telle sorte que tout prétexte fût enlevé à l'incrédulité. Il naît d'une vierge qui ne connaît point ce qui a rapport à la génération, qui n'a point coopéré à ce qui s'accomplit, qui n'a eu rien contribué à ce qui est fait, ruais qui est un simple instrument de la puissance ineffable et qui sait seulement ce qu'elle a appris de Gabriel en l'interrogeant. « Comment cela se « peut-il faire puisque je ne connais point d'homme ? » (Luc, I, 34.) Ce à quoi il répond: Voulez-vous le savoir ? « L'Esprit-Saint descendra en vous et la puissance du Très-Haut vous couvrira de son ombre. » (Ibid. 35.) Or, comment le Seigneur était-il avec elle et, bientôt après, recevant d'elle la naissance? De même que l'artisan qui trouve une matière très-belle et parfaitement disposée en fabrique un vase merveilleux, ainsi le Christ trouvant le corps saint et l'âme de la Vierge se construit un temple animé, il forme dans son sein l'homme tel qu'il l'a résolu, se revêt de cette nature humaine et se manifeste aujourd'hui, n'ayant point rougi de la difformité de notre nature. Ce n'a pas été pour lui un opprobre de se revêtir de son propre ouvrage, et c'était pour son oeuvre une gloire éclatante que celle de devenir le vêtement de Celui qui l'avait faite. De même que dans la première formation il était impossible que l'homme existât avant que la terre dont il fut fait vînt entre les mains de son Créateur, ainsi il était impossible que le corps corruptible de l'homme reçût une nouvelle nature avant que Celui qui l'avait faite s'en fût revêtu.
Que dirai-je donc ou comment parlerai-je (Ce qui suit est cité par saint Cyrille dans son livre aux Reims.)?

Ce mystère me frappe d'admiration. L'Ancien des jours devient enfant; Celui qui est assis sur un trône élevé et inaccessible repose dans la crèche; Celui que le sens du toucher ne peut connaître, qui est simple, sans composition de parties et qui n'a point de corps est touché par des mains humaines ; Celui qui brise les liens de. l'iniquité est retenu dans les liens que forment ses langes, parce qu'il l'a ainsi voulu. Il a résolu de changer l'ignominie en honneur, l'infamie en un titre de gloire, l'outrage extrême en une preuve de vertu. C'est pourquoi il a pris mon corps, afin que je puisse porter en moi son Verbe; et prenant ma chair, il m'a donné son Esprit, afin que donnant et recevant il puisse amasser pour moi un trésor de vie. Il a pris ma chair, afin de me sanctifier; il m'a donné son Esprit afin de me sauver.

Mais, encore une fois, que dirai-je ou comment parlerai-je? « Voici qu'une vierge concevra. » (Isaïe, VII, 14. ) Ce n'est plus désormais une chose à venir dont il est parlé; c'est une chose accomplie qui est proposée à notre admiration. C'est parmi les Juifs que s'est accomplie cette parole prononce au milieu d'eux; c'est parmi nous qu'elle est crue, parmi nous qui n'en avions pas même entendu le premier mot: « Voici que la vierge concevra. » (Isaïe, VII, I4.) La synagogue gardait la promesse écrite ; l'Eglise possède l'objet de la promesse. L'une a possédé le livre et l'autre les trésors promis par ce livre ; l'une a su teindre la laine et l'autre a revêtu la robe de pourpre qui en a été tissue. La Judée l'a enfanté; la terre entière l'a reçu. La synagogue l'a nourri et élevé ; l'Eglise le possède et recueille les fruits de sa présence. Celle-là eut le cep de la vigne et près de moi sont les fruits mûrs de la vérité. Celle-là a vendangé les raisins ; mais les nations boivent le breuvage mystique. Celle-là a semé le grain du froment dans la Judée; mais les nations ont moissonné avec la faux la moisson de la foi. Les nations ont recueilli avec piété la rose , tandis que l'épine de l'incrédulité est demeurée parmi les Juifs. Le petit s'est envolé et les insensés restent assis auprès du nid demeuré vide. Les Juifs interprètent la lettre, qui est semblable à la feuille, et les nations recueillent le fruit de l'Esprit.

« La Vierge concevra. » Dis-moi clone le reste, ô juif ! dis-moi quel est Celui qu'elle a enfanté? Aie en moi autant de confiance qu'en Hérode. Mais tu manques de confiance, et je sais pourquoi. Tu ne penses qu'à tendre des embûches. Tu l'as dit à Hérode afin qu'il le mît à mort; tu ne me le dis pas, pour que je ne puisse l'adorer. Quel est donc Celui qu'elle a enfanté ? Quel est-il? C'est. le Maître de la nature. Lorsque tu gardes le silence, la nature crie. Elle a enfanté Celui qui a été mis au monde de la façon qu'il avait choisie pour naître. Ce n'est pas la nature qui avait réglé cet enfantement, mais c'est le Maître de la nature qui introduit ce mode inusité de naissance, afin de montrer, en se faisant homme, qu'il ne naît pas comme un homme, mais comme un Dieu.
Il naît aujourd'hui d'une vierge qui triomphe de la nature et qui remporte la victoire sur le mariage. Il convenait au Dispensateur de la sainteté qu'il naquît d'un enfantement pur et saint.

Il est Celui qui forma autrefois Adam d'une terre vierge et ensuite lira la Lemme d'Adam sans le concours d'une mère. De même qu'Adam, sans mère, donna naissance à la femme, ainsi la Vierge enfante aujourd'hui un homme sans le concours de l'homme. Et parce que le sexe de la femme était redevable envers l'homme depuis qu'Adam avait donné naissance à la femme sans le secours d'une femme, aujourd'hui la Vierge paye à l'homme la dette contractée par Eve, puisqu'elle enfante sans le secours de l'homme. Afin qu'Adam ne puisse s'enorgueillir d'avoir produit la femme sans le secours d'une femme, la Vierge engendre un homme sans le secours de l'homme, de telle sorte que l'égalité résulte de la parité des merveilles opérées. Adam perdit une de ses côtes et n'en fut pas amoindri; d'autre part, le Seigneur s'est formé dans le sein de la Vierge un temple animé et il n'a point détruit sa virginité. Adam demeura sain et sauf après l'enlèvement de sa côte; la Vierge n'a point été flétrie après la naissance de son fils.
Le Seigneur n'a point voulu se construire un autre temple, ni se revêtir d'un corps formé d'une autre manière, pour faire connaître qu'il ne méprisait pas le limon d'Adam. Et, parce que l'homme trompé était devenu l'instrument de Satan, il a fallu qu'il prît comme un temple animé celui-là même qui avait été séduit, afin que par cette union avec son Créateur, il l'arrachât à l'union et au service de Satan. Et, toutefois, se faisant homme, le Christ n'est pas mis au monde comme un homme, mais comme un Dieu, parce que s'il était issu, comme l'un de nous, d'un mariage ordinaire , la foule n'eût pas voulu croire en lui. Mais il naît d'une vierge et, en naissant, il garde le sein de sa mère immaculé, et cette vierge elle-même sans souillure, afin que les circonstances inusitées d'un pareil enfantement nous inspirent une foi plus grande. Donc, si le Gentil m'interroge ou si le juif n'interroge pour savoir si le Christ, étant Dieu par nature, s'est fait homme en dehors des lois de la nature, je répondrai qu'il en est ainsi, et j'en donnerai pour preuves les marques d'une virginité qui n'a point été violée. Car il n'y à qu'un Dieu qui puisse vaincre l'ordre de la nature , il n'y a que Celui qui a fait le sein de la femme et lui a donné sa virginité qui ait pu préparer pour lui-même ce mode immaculé de sa naissance et se construire, selon son désir, un temple bâti d'une manière ineffable.

Dis-moi donc, ô juif, si la Vierge a enfanté ou non ? Si elle a enfanté, reconnais la (583) merveille de cet enfantement. Mais si elle n'a point enfanté, pourquoi as-tu trompé Hérode? C'est toi-même qui as répondu lorsqu'il demandait où devait naître le Christ : « A Béthléem, dans la terre de Juda. » (Matth. II, 5.) Est-ce que je connaissais cette bourgade ou ce lieu? Est-ce que j'étais informé de la dignité de Celui qui venait de naître? Est-ce que ce n'est pas Isaïe qui fait mention de lui comme d'un Dieu? «Elle enfantera un fils,» dit-il, « et on l'appellera Emmanuel. » (Isaïe, VII, 14.) N'est-ce pas vous, adversaires sans bonne foi, qui nous avez appris la vérité? N'est-ce pas vous, scribes et pharisiens, observateurs exacts de la loi, qui nous avez instruits de toute cette affaire? (Matth. I, 23.) Est-ce que nous connaissions la langue hébraïque? Est-ce que vous n'avez pas été vous-mêmes les interprètes des Ecritures? Après que la Vierge eut enfanté, avant qu'elle enfantât, n'est-ce pas vous qui, interrogés par Hérode, afin qu'il fût clair que ce passage n'est pas interprété avec partialité, avez apporté en témoignage le prophète Michée, à l'appui de votre discours? « Et toi,» dit-il, «Béthléem, maison de paix, tu n'es pas la dernière entre les principales villes de Juda; car c'est de toi que sortira le chef qui gouvernera mon peuple d'Israël.» (Mich. V, 2; Matth. 2, 6.) Le prophète a dit avec raison : « De toi, » car c'est de vous qu'il est sorti pour être donné au monde.

Celui qui est se manifeste, mais celui qui n'est pas est créé ou formé. Mais lui, il était; il était auparavant; il était toujours. Il était de toute éternité comme Dieu, gouvernant le inonde. Aujourd'hui, il se manifeste comme homme afin de gouverner son peuple, mais comme Dieu il sauve toute la terre. O ennemis utiles ! O accusateurs bienveillants ! Vous dont l'imprudence a révélé le Dieu né dans Béthléem, vous qui avez fait connaître le Seigneur caché dans la crèche, vous qui sans le vouloir avez montré la retraite dans laquelle il repose, vous qui devenus nos bienfaiteurs contre votre gré avez découvert ce que vous vouliez laisser dans l'ombre ! Voyez-vous ces maîtres inhabiles? Ce qu'ils enseignent, ils l'ignorent: ils meurent de faim et ils nous nourrissent; ils ont soif et ils nous désaltèrent; ils sont dans l'indigence et ils nous enrichissent.
Venez donc et célébrons cette fête; venez et que ce soit pour nous un jour de solennité. Que la manière de célébrer cette, fête soit extraordinaire, puisque le récit de cette naissance est extraordinaire. Aujourd'hui, le lien antique est brisé, le diable est couvert de confusion, les démons se sont enfuis, la mort est détruite, le paradis est ouvert, la malédiction est effacée, le péché a été banni, l'erreur a été vaincue, la vérité est revenue, et la parole dé la piété est répandue et propagée en tous lieux. La vie du ciel est implantée sur la terre, les anges communiquent avec les hommes, les hommes ne craignent point de s'entretenir avec les anges. Et pourquoi? Parce qu'un Dieu est venu sur la terre et l'homme dans le ciel, et qu'ainsi tout a été uni et mêlé. Il est venu sur la terre, lui qui est tout entier dans le ciel, et, étant tout entier dans le ciel, il est tout entier sur la terre. Etant Dieu, il s'est fait homme, sans renoncer à sa divinité. Etant le Verbe, non sujet au changement, il s'est fait chair: il s'est fait chair afin d'habiter parmi nous. Il n'est point devenu Dieu, mais il était Dieu. Mais il s'est fait chair, afin qu'une crèche pût recevoir Celui que le ciel ne pouvait contenir. Il est donc posé dans la crèche, afin que Celui qui nourrit toute créature reçoive d'une vierge mère la nourriture qui convient à un petit enfant.
De la sorte, le Père des siècles à venir devient un enfant à la mamelle et repose sur les bras d'une vierge, afin d'offrir aux mages un accès plus facile. Car aujourd'hui les mages arrivent et donnent l'exemple de ne point obéir au tyran : le ciel se réjouit et indique le lieu où repose son Seigneur, et ce Seigneur porté sur le nuage léger du corps qu'il a choisi s'avance rapidement vers le pays d'Egypte. En apparence, il luit les embûches d'Hérode ; dans la réalité, il accomplit ce qui avait été dit par le prophète Isaïe : « En ce jour-là, » dit-il, « Israël sera le troisième, après l'Assyrien; parmi les Egyptiens sera mon peuple béni sur la terre que bénit le Seigneur Dieu des armées en disant: Béni sera mon peuple en Egypte, en Assyrie, et en Israël! » (Isaïe, XIX, 24.)
Que diras-tu, ô juif, toi, le premier, qui deviens le troisième? Les Egyptiens et les Assyriens sont mis avant toi, et Israël, le premier-né, est compté ensuite. Il en est ainsi à bon droit. Les Assyriens viendront d'abord, puisque les premiers, ils ont adoré en la personne des mages. Les Egyptiens après les Assyriens, parce qu'ils l'ont reçu fuyant les (584) embûches d'Hérode. Israël sera compté le dernier parce qu'après la sortie du Jourdain il l'a reconnu par la personne des apôtres. Il est entré en Egypte renversant les idoles de l'Egypte faites de la main de l'homme, après avoir fait mourir les premiers-nés des Egyptiens. (Isaïe, XIX, 1.) C'est pourquoi aujourd'hui il se présente en qualité de premier-né, afin de faire disparaître un deuil ancien. Qu'il soit appelé premier-né, c'est ce qu'atteste Luc l'évangéliste, en disant : « Et elle mit au monde son premier-né, et elle l'enveloppa de langes, et elle le plaça dans la crèche parce qu'il n'y avait point de place pour eux dans l'hôtellerie. » (Luc, II, 7.) Il entre en Egypte pour mettre fin au deuil antique, apportant la joie et non des plaies nouvelles, et au lieu de la nuit et des ténèbres la lumière du salut. Jadis, l'eau du fleuve avait été souillée par la mort des enfants enlevés avant l'âge. Maintenant, celui-là même entre en Egypte qui, autrefois, avait rougi ces ondes; il donne à l'eau du fleuve la vertu d'engendrer le salut, purifiant par la puissance de l'Esprit tout ce qu'il y avait en elle d'impur et de souillé. Les Egyptiens, frappés de diverses plaies et se laissant aller à leur fureur, avaient méconnu Dieu. Il entre en Egypte et remplit de la connaissance de Dieu les âmes religieuses qui sont dans cette contrée, en sorte que la terre arrosée par le Nil aurait bientôt plus de martyrs que d'épis.
A cause de la brièveté du temps, je terminerai ici mon discours. Je terminerai lorsque j'aurai dit comment le Verbe, qui est immuable, est devenu chair, sans changement de sa nature. Mais que dirai-je ou comment parlerai-je ? Je vois un artisan, une crèche, un enfant, des langes, (enfant né de la Vierge privé des choses nécessaires, de toutes parts la pauvreté, de toutes parts l'indigence. Avez-vous vu le riche dans une pauvreté profonde? Comment étant riche est-il devenu pauvre à cause de nous? Comment n'a-t-il point un lit, point de molle toison, mais la crèche toute nue sur laquelle il est jeté ? O pauvreté, source de richesses ! 0 richesses sans mesure, qui n'avez que l'apparence de la pauvreté ! Il repose dans la crèche et il ébranle le mande entier. Il est enveloppé dans les liens de ses langes et il brise les liens du péché. Il n'a pas encore fait entendre sa voix et il a instruit les mages et il les a disposés à la conversion.
Que dirai-je donc on comment parlerai-je? Voici l'enfant enveloppé de ses langes et couché dans la crèche ; Marie, vierge et mère est près de lui ; près de lui est Joseph, regardé comme son père. Celui-ci est appelé le mari, celle-là est saluée du nom de femme ; mais ces noms légitimes sont dépouilles de toute leur signification habituelle, ils doivent être compris comme une simple appellation, mais une appellation qui ne va point jusqu'à la nature des choses. Joseph est l'époux de Marie, mais l'Esprit-Saint l'a couverte de son ombre. Et c'est pour cela que Joseph hésite et ne sait quel nom donner à l'enfant. Il n'osait pas dire qu'il fût le fruit de l'adultère et ne pouvait proférer ce blasphème contre la Vierge, mais il ne pouvait pas dire qu'il fût son propre fils, car il savait qu'il ignorait comment et d'où l'enfant tirait son origine. C'est pour cela que, tandis qu'il doute, un oracle du ciel lui est apporté par la voix de l'ange : « Ne crains pas Joseph, car ce qui est né d'elle est de l'Esprit-Saint. » (Matth. I, 20.)
L'Esprit-Saint a couvert la Vierge de son ombre. Pourquoi donc est-il né de la Vierge, en conservant savirginité immaculée? Afin que, si jadis Satan trompa Eve encore vierge, Gabriel, à son tour, vint apporter un heureux message à Marie, elle-même vierge. Mais Eve trompée enfanta une parole qui introduisit la mort dans le monde, tandis que Marie, recevant un heureux message, enfanta dans la chair le Verbe qui nous donne la vie éternelle. La parole d'Eve indiqua le bois par lequel Adam fut chassé du paradis; le Verbe sorti de la Vierge montre la croix par laquelle il introduit le larron à la place d'Adam dans le paradis. Car comme les gentils, les juifs et les hérétiques ne voulaient pas croire que Dieu engendre sans écoulement de sa substance, en demeurant immuable, c'est pourquoi aujourd'hui, sorti d'un corps sujet au changement, il a conservé, dans son intégrité, ce corps sujet au changement, pour nous faire comprendre que, de même qu'il est né d'une vierge sans briser sa virginité, ainsi Dieu, sans changement ni écoulement de sa substance sainte., comme Dieu, a engendré un Dieu, ainsi qu'il convenait à un Dieu.

Et, parce que les hommes, ayant abandonné Dieu, se sont fait des statues de forme humaine auxquelles ils portaient leur culte, au mépris du Créateur; à cause de cela, (585) aujourd'hui, (585) le Verbe de Dieu, étant Dieu, apparaît sous la forme de l'homme, afin de détruire le mensonge et de transporter vers lui-même tout culte. A lui donc qui rétablit de la sorte toutes choses dans une voie meilleure, à Celui qui est le Christ Notre-Seigneur, gloire et honneur, ainsi qu'au Père et au Saint-Esprit, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles ! Ainsi soit-il.

Traduit par M. HORIOT.

24 décembre 2006

Préparation de l' Avent

Etude de l'icône de la Nativité



"Le chemin de l'iconographie est un lent et patient retour à l'essentiel, par l'acquisition d'un regard simplifié, purifié et pacifié concentré sur la Personne du Sauveur. Au-delà des paroles, des symboles, des couleurs et des formes, il s'agit de contempler le visage du Christ, et en Lui, le visage du Père."

Père Boris - Père Alexis

Les Pères et la Nativité

Textes liturgiques

Proto évangile de Jacques


L'icône de la Nativité contient en elle seule toute la quintessence de la foi chrétienne. La conclusion tirée de l'ouvrage du Père Georges Drobot nous montre à quel point cette icône est liée au Credo :

« Voilà comment chaque détail de l'icône de la Nativité affirme ou explicite le dogme de l'Incarnation. conformément au Credo:« Notre Seigneur Jésus-Christ (indiqué par l'inscription à côté de l'Enfant)... Lumière de lumière (les cieux et l'étoile), Vrai Dieu de Vrai Dieu (le nimbe du Christ comporte toujours l'inscription [« Je suis Celui qui est »], ...qui pour nous, les hommes (présence des bergers et des Mages), et pour notre salut est descendu des cieux et s'est incarné de l'Esprit Saint (la participation de la Trinité à l'Incarnation est indiquée par les trois rayons de l'étoile) et de la Vierge Marie ( qui occupe le centre de la composition pour bien signifier son rôle, et qui est désignée par le nom de "Mère de Dieu "), et devint homme ( ce qu'indiquent les femmes baignant l'Enfant). » La passion soufferte pour notre salut est également indiquée par la croix qui marque le nimbe du Nouveau-né, et la restauration de la création par la beauté surnaturelle du paysage et la simultanéité des épisodes, puisqu'au Royaume de Dieu, il n'y aura plus de temps... Et toutes les créatures - les anges, les hommes et les animaux - sont admises à la contemplation du petit Enfant, Dieu d'avant les siècles. »

Dans le cadre des ateliers saint Joseph, Hélène Bléré a réalisé cette étude de l'icône de la Nativité qui nous conduira jusqu'à la fête de Noël.

Bref historique
Sens général, contenu de l'icône

Les différents éléments composant l'icône sont tous très riches de significations théologiques et spirituelles, c'est pourquoi nous allons les étudier un par un, selon l'ordre suivant :

La mère de Dieu
L'Enfant et la crèche
Le bœuf et l'âne
La grotte
Les anges et l'étoile
Les bergers
Les mages
Saint Joseph
Le bain de l'Enfant
Le paysage

23 décembre 2006

Textes liturgiques de la Théophanie

Vêpres- tropaire, t. 1

Dans le Jourdain lorsque, Seigneur, tu fus baptisé, à l'univers fut révélée la sainte Trinité; en ta faveur seJit entendre la voix du Père te désignant comme son Fils bien-aimé; et l'Esprit sous forme de colombe confirma la vérité du témoignage. Christ notre Dieu qui t'es manifesté, illuminateur du monde, gloire à toi.


Vêpres- litie, t4

Le Christ est baptisé, il remonte des eaux; avec lui c'est le monde qu'il fait sortir; il voit s'ouvrir les cieux que jadis Adam ferma pour lui et ses descendant~. De sa divinité l'Esprit est le témoin, car il accourt vers son égal; et la voix du Père descend du ciel, car c'est de là que provient l'objet du témoignage, le Sauveur de nos âmes.

Matines - cathisme, t. 4

Tu sanctifias les flots du Jourdain et brisas la force du péché, ô Christ notre Dieu; tu t'inclinas sous la main du Précurseur et sauvas de l'erreur le genre humain; c'est pourquoi nous t'en prions: sauve ce monde qui est tien.

Matines - Synaxaire

Le 6 Janvier, la sainte Théophanie de notre Seigneur, Dieu et Sauveur Jésus Christ.Le Baptême du Christ, ayant ouvert les cieux, par cette déchirure fait entrer tous ceux qui ont gardé sans tache leur tunique neuve. Le six, le Précurseur baptise Christ au fleuve.A lui la gloire et la puissance dans les siècles des siècles. Amen. Matines - Laudes, t. 1Lumière de lumière, le Christ notre Dieu en sa divine épiphanie a resplendi sur le monde: peuples, prosternons-vous devant lui.Nous, tes serviteurs, ô Christ, comment pourrons-nous t'honorer dignement, toi le Maître qui dans les eaux nous as tous renouvelés ?Baptisé dans le Jourdain, tu sanctifias les eaux, Dieu Sauveur, en acceptant qu'un serviteur t'impose les mains pour guérir le monde de toute passion. Grand est le mystère de ton salut!Seigneur ami des hommes, gloire à toi. .

La vraie lumière est apparue, à tous elle fait don de sa clarté. Le Christ est baptisé avec nous, lui qui surpasse tout être en pureté ; il insuffle la sanctification.dans les eaux, qui deviennent purification pour les âmes; à la terre appartient ce que l'on voit, mais ce que l'on conçoit est plus haut que les cieux; par l'ablution vient le salut ! Par l'eau nous vient l'Esprit, par l'immersion notre montée jusqu'à Dieu. Merveilles que tes œuvres, Seigneur, gloire à toi. Celui qui revêt le ciel de nuées revêt en ce jour les flots du Jourdain; et celui qui enlève le péché du monde opère également ma propre purification; d'en haut témoigne l'Esprit consubstantiel qu'il est le Fils unique du Père Très-Haut ; disons-lui: Toi qui es apparu et qui nous sauves, Christ notre Dieu, gloire à toi.

Les Pères et la Théophanie

De l'Ancien Testament au Nouveau Testament : préparation et transmission


De saint Irénée de Lyon (IIe siècle)


« Jésus-Christ a eu comme précurseur Jean-Baptiste, dont la mission a été de préparer et de former le peuple à la réception du Verbe de vie. Et Jean-Baptiste a déclaré que le Christ était celui-là même sur lequel reposa l'Esprit de Dieu uni à son corps. »
(La prédication des apôtres et ses preuves 41 )


De saint Ephrem le Syrien - ou de Nisibe (IVe siècle)

«Le Christ, lui, est le commencement du Nouveau Testament. Par le baptême, le seigneur a revêtu la justice de l'Ancien Testament, pour recevoir la perfection de l'onction et la donner pleinement et intégralement à ses disciples ; car, en même temps, il a mis fin au baptême de Jean et à la loi. Il fut baptisé dans la justice, parce qu'il était sans péché, mais il a baptisé dans la grâce, parce que les autres hommes étaient pêcheurs. (...)

Accomplissons toute justice. Jean était à la porte du bercail où était rassemblé dans l'unité le troupeau des Israélites ; Notre Seigneur y pénétra non par sa puissance, mais par sa justice. L'Esprit qui reposa sur lui pendant son baptême attesta qu'il était le pasteur et, par l'intermédiaire de Jean, Jésus reçut la prophétie et le sacerdoce. Il avait déjà reçu la royauté de la maison de David en naissant de la maison de David; il reçut le sacerdoce de la maison de Lévi par la seconde naissance que lui conférait le baptême du fils d'Aaron. Qui croit à sa seconde naissance dans le monde, ne peut douter qu'elle lui a donné, avec le baptême de Jean, son sacerdoce. Beaucoup furent baptisés ce jour-là, mais l'Esprit ne descendit et ne se reposa que sur un seul, pour distinguer par un signe celui qui, par son apparence, ne se distinguait pas des autres hommes. Et parce que l'Esprit était descendu dans son baptême, l'Esprit fut donné par son baptême. »
(Commentaire de l'Evangile concordant ou Diatessaron, chapitre IV, 2 et 3)


De saint Grégoire de Nazianze (ou le Théologien) (IVe siècle)

«Le baptême fut donné par Moïse, mais dans l'eau et avant lui, dans la nuée et dans la mer. Ce n'étaient là que symboles - et c'est la pensée de saint Paul- la mer figurant l'eau; la nuée l'Esprit Saint; la manne, le pain de vie ; la boisson, le breuvage divin. Il lui fut aussi conféré par Jean, et non plus suivant la loi judaïque; car Jean ne baptisa pas seulement dans l'eau mais aussi en vue du repentir; mais ce n'étaient pas là encore un baptême tout à fait spirituel; d'ailleurs il n'ajoutait pas la formule « dans l'Esprit ».

Jésus baptisa aussi, mais dans l'Esprit. Voilà la perfection. Et comment ne serait-il pas Dieu (...) celui grâce auquel tu deviens Dieu toi aussi ? Je sais qu'il existe aussi une quatrième sorte de baptême, celui du martyre et du sang et qui dépasse d'autant plus les autres en valeur qu'il ne peut plus être terni par aucune souillure. J'en connais encore un cinquième, celui des larmes, il est plus pénible que le précédent car chaque nuit il inonde de pleurs sa couche ou son grabat ; grâce à lui les meurtrissures du vice exhalent leur odeur nauséabonde ; il s'avance dans le deuil et la tristesse ; il imite le repentir de Manassé et l'humilité des Ninivites qui furent pardonnés ; il parle le langage du publicain dans le temple et se voit justifié à l'encontre du pharisien orgueilleux ; il se prosterne comme la Cananéenne, implore fa miséricorde et mendie des miettes de pain, nourriture des chiens affamés. »
(Discours XXXIX)

« Il est trois espèces de nativités reconnues par les Ecritures ; la première est corporelle, la deuxième vient du baptême et la troisième procède de la résurrection. La première est entachée de nuit, d'esclavage et de concupiscence ; la deuxième est éclairée de lumière et parée de liberté, elle nous délivre des sentiments pervers, arrachant tout ce voile qui nous entoure dès la naissance et nous conduisant vers la vie surnaturelle; la dernière est à la fois plus redoutable et plus brève ; elle rassemble en un instant toute la création humaine autour de son créateur pour lui rendre compte de son esclavage terrestre et de sa vie passée, qu'elle ait écouté les injonctions de la chair ou que, fidèle aux inspirations de l'Esprit, elle se soit détachée de la terre pour monter et honorer la grâce de la Rédemption ; toutes ces formes de nativité, il est bien évident que mon Christ les a honorées. ; la première, par cette insufflation primordiale qui inaugure la vie physique; la deuxième par son Incarnation et le Baptême qu'il se conféra lui-même ; la troisième par l'Ascension qu'il avait lui-même prédite; ( .. .) »­
(Discours XL)


Action et présence du Saint-Esprit

De saint Cyrille de Jérusalem (IV e siècle)
« Lorsque, baigné dans les eaux du Jourdain, et leur ayant communiqué les effluves de sa divinité, le Christ en fut remonté, le Saint Esprit fit en personne irruption sur lui, le semblable se reposant sur son semblable. De même, remontés de la cuve aux saintes eaux, vous reçûtes la chrismation, la marque dont fut chrismé le Christ. Or cette chrismation est l'Esprit Saint. » (Catéchèse baptismale XXI, IVe siècle)


De saint Ambroise de Milan (IV e siècle)

« Et voilà que l'Esprit-Saint descendit comme une colombe. Ce n'est pas une colombe qui descendit, mais comme une colombe. Souviens-toi de ce que j'ai dit : le Christ a pris une chair, non pas comme une chair, mais la réalité de cette chair, le Christ a vraiment pris chair, tandis que l'Esprit-Saint descendit du ciel sous l'apparence d'une colombe ; non pas la réalité d'une colombe, mais sous l'apparence d'une colombe : Jean vit donc et il crut. »
(Des sacrements, I, 17)




Sa manifestation au monde



De saint Jean Chrysostome (IVe siècle)

« C'est par le baptême et non par la naissance que le Sauveur s'est fait connaître de tous (. . . ) Donc, on appelle Manifestation de Dieu (Théophanie) non pas le jour où le Seigneur est né, mais le jour où il a été baptisé. »
(Homélie XXXVII sur le baptême)


Du Christ à nous

De saint Ambroise de Milan (IVe siècle)

« Le Seigneur a donc été baptisé : Il voulait non pas être purifié mais purifier les eaux, afin que, lavées par la chair du Christ qui n'a pas connu le péché, elles eussent le pouvoir de baptiser. Ainsi quiconque vient au bain du Christ y laisse ses péchés. (…) il m'a donné à moi pauvre, il m'a donné à moi indigent la grâce que je n'avais pas auparavant : sa justice demeure donc à jamais. Qu'est-­ce que la justice, sinon d'entreprendre le premier ce que vous voulez que fasse autrui et d'encourager les autres par votre exemple ? Qu'est-ce que la justice, sinon qu'ayant pris chair, loin d'écarter comme étant Dieu la sensibilité ou les servitudes de la chair, Il triomphât de la chair comme homme pour m'enseigner à en triompher? » .
(Traité sur1 'Evangile de saint Luc, II, 83 et 90)

16 décembre 2006

Mémoire des ancêtres du Seigneur


Luc XVI 15-18

15 Jésus leur dit: Vous, vous cherchez à paraître justes devant les hommes, mais Dieu connaît vos coeurs; car ce qui est élevé parmi les hommes est une abomination devant Dieu.
16 La loi et les prophètes ont subsisté jusqu'à Jean; depuis lors, le royaume de Dieu est annoncé, et chacun use de violence pour y entrer.
17 Il est plus facile que le ciel et la terre passent, qu'il ne l'est qu'un seul trait de lettre de la loi vienne à tomber.
18 Quiconque répudie sa femme et en épouse une autre commet un adultère, et quiconque épouse une femme répudiée par son mari commet un adultère.


Luc XVII 1-4

1 Jésus dit à ses disciples: Il est impossible qu'il n'arrive pas des scandales; mais malheur à celui par qui ils arrivent!
2 Il vaudrait mieux pour lui qu'on mît à son cou une pierre de moulin et qu'on le jetât dans la mer, que s'il scandalisait un de ces petits.
3 Prenez garde à vous-mêmes. Si ton frère a péché, reprends-le; et, s'il se repent, pardonne-lui.
4 Et s'il a péché contre toi sept fois dans un jour et que sept fois il revienne à toi, disant: Je me repens, -tu lui pardonneras.



Icône de Maria Lavie : synaxaire d'Abraham

Le dimanche situé entre le 11 et le 17 décembre, nous célébrons la mémoire des ANCÊTRES du SEIGNEUR

En ces jours qui nous rapprochent de la Nativité de notre Dieu et Sauveur Jésus-Christ, les Saints Pères, mûs par le Saint Esprit et par leur science pastorale, ont institué de célébrer la mémoire du Patriarche Abrabam, le Père des croyants, et de sa lignée: les Ancêtres selon la chair de notre Sauveur.

Issu de la terre des Chaldéens idolâtres, le Patriarche Abraham n'hésita pas un instant à quitter son pays, sa maison, sa famille et ses biens, à rappel de Dieu, pour se rendre vers la terre de Canaan que le Seigneur lui donna en héritage, en lui promettant une glorieuse postérité et une alliance éternelle. Le fruit de cet acte de foi fut Isaac, que Dieu lui accorda dans sa vieillesse.

Puis d'Isaac naquit Jacob, et de Jacob sortirent les douze Patriarches, pères des douze tribus d'Israël. C'est finalement de la tribu de Juda que, conformément aux Ecritures, devait naître le Christ, l'aboutissement des promesses, et la plénitude de l'alliance et de l'union entre Dieu et les hommes.Par l'intermédiaire des Saints Ancêtres et Patriarches, notre Seigneur Jésus-Christ est donc en quelque manière lui aussi le fruit de la foi d'Abraham.

C'est pourquoi, lorsque pour chacun d'entre nous, Dieu fait entendre sa voix alors que nous sommes encore dans la terre étrangère des passions et des vanités de ce monde, il nous faut, comme Abraham, abandonner sans hésitation ce qui est nôtre et suivre avec foi l'appel divin jusqu'à la Terre Promise, où nous pourrons à notre tour donner naissance, de manière spirituelle, au Christ. Car planté en nous par la Foi et le Baptême, Il doit croître et grandir en nous par les saintes vertus, afin de resplendir dans la lumière de la contemplation. Devenus «fils de Dieu» par le don du Saint-Esprit, nous devons donc voir le Christ se former en nous, les descendants d'Abraham: « Tous en effet, vous êtes fils de Dieu par la foi au Christ Jésus, car vous qui avez été baptisés dans le Christ, vous avez revêtu le Christ (...) Vous tous, en effet, vous ne faites qu'un dans le Christ Jésus. Mais si vous appartenez au Christ, vous êtes donc descendance d'Abraham, héritiers aux termes de la promesse». (Galates 3:26-29).

Devenons donc à notre tour ancêtres du Christ en persévérant dans la foi, afin de célébrer sa Nativité en disant: «Ce n'est plus moi qui vis, c'est le Christ qui vit en moi!» (Gal. 2:20)

1.1. Notice plus complète sur le Patriarche Abraham, voir le jour de sa commémoration: 9 octobre, tome 1.

09 décembre 2006

Ne pas thésauriser

















Luc XII, 16-21

16 Et il leur dit cette parabole : Les terres d'un homme riche avaient beaucoup rapporté.
17 Et il raisonnait en lui-même, disant : Que ferai-je? car je n'ai pas de place pour serrer ma récolte.
18 Voici, dit-il, ce que je ferai : j'abattrai mes greniers, j'en bâtirai de plus grands, j'y amasserai toute ma récolte et tous mes biens ;
19 et je dirai à mon âme : Mon âme, tu as beaucoup de biens en réserve pour plusieurs années ; repose-toi, mange, bois, et réjouis-toi.
20 Mais Dieu lui dit: Insensé ! cette nuit même ton âme te sera redemandée ; et ce que tu as préparé, pour qui cela sera-t-il ?
21 Il en est ainsi de celui qui amasse des trésors pour lui-même, et qui n'est pas riche pour Dieu.

03 décembre 2006

Le bon Samaritain




Luc X , 25-37


25 Un docteur de la loi se leva, et dit à Jésus, pour l'éprouver: Maître, que dois-je faire pour hériter la vie éternelle?
26 Jésus lui dit: Qu'est-il écrit dans la loi? Qu'y lis-tu?
27 Il répondit: Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu, de tout ton coeur, de toute ton âme, de toute ta force, et de toute ta pensée; et ton prochain comme toi-même.
28 Tu as bien répondu, lui dit Jésus; fais cela, et tu vivras.
29 Mais lui, voulant se justifier, dit à Jésus: Et qui est mon prochain?
30 Jésus reprit la parole, et dit: Un homme descendait de Jérusalem à Jéricho. Il tomba au milieu des brigands, qui le dépouillèrent, le chargèrent de coups, et s'en allèrent, le laissant à demi mort.
31 Un sacrificateur, qui par hasard descendait par le même chemin, ayant vu cet homme, passa outre.
32 Un Lévite, qui arriva aussi dans ce lieu, l'ayant vu, passa outre.
33 Mais un Samaritain, qui voyageait, étant venu là, fut ému de compassion lorsqu'il le vit.
34 Il s'approcha, et banda ses plaies, en y versant de l'huile et du vin; puis il le mit sur sa propre monture, le conduisit à une hôtellerie, et prit soin de lui.
35 Le lendemain, il tira deux deniers, les donna à l'hôte, et dit: Aie soin de lui, et ce que tu dépenseras de plus, je te le rendrai à mon retour.
36 Lequel de ces trois te semble avoir été le prochain de celui qui était tombé au milieu des brigands?
37 C'est celui qui a exercé la miséricorde envers lui, répondit le docteur de la loi. Et Jésus lui dit: Va, et toi, fais de même.



Méditation d'un moine de l'Eglise d'occident
XXV-ème dimanche après la Pentecôte


Chers frères et sœurs !


Voilà un passage de l’Evangile qui tombe à pic dans cette période de carême qui tout doucement nous achemine vers la fête de la Nativité ; vers ce grand mystère de l’Incarnation…
Cette parabole tombe à pic car elle se doit de nous interpeller à plusieurs niveaux de notre vie spirituelle.

Tout d’abord la question posée au Christ par le légiste doit être pour nous comme un postulat de base :
« Que faire pour avoir part à la vie éternelle ? ».
Tout comme le Christ l’a répondu au légiste, Il répond à chacun d’entre nous de manière personnelle :
Aimer le Seigneur notre Dieu de tout notre cœur, de toute notre âme, de toute notre force, de tout notre esprit ; et aimer notre prochain comme nous-mêmes.
Certainement le second de ces commandements nous donnera alors l’occasion de poser à Jésus cette autre question ; « Qui est mon prochain ? » ; question à laquelle le Christ donne une réponse toute en nuance par cette parabole du bon samaritain.

Pour un juif de l’époque ; le prochain était exclusivement quelqu’un qui était membre de son peuple et surtout pas un étranger comme par exemple un samaritain ! En faisant secourir un malheureux par l’un d’entre eux justement ; Jésus veut nous montrer que la charité ; autrement dit l’amour chrétien par excellence ; se doit d’ignorer les cloisonnements de race, de religion, de nationalité ; et (tant qu’on y est puisque nous sommes orthodoxes), les cloisonnements de juridictions !


Tout dépend donc de nous : nous nous devons de ne plus poser de limites ; de classements ; d’étiquettes sur nos semblables, ces pseudos droits que nous nous arrogeons et qui nous permettent trop facilement de compartimenter un secteur « prochain » au-delà duquel nous ne serions plus tenus.
Si nous prétendons vouloir marcher à la suite du Christ, nous sommes invités à faire de quiconque notre prochain ; de nous faire en tout temps disponible, le cas échéant secourable ; mais toujours, et en tout état de cause nous devons nous faire aimant ; car l’amour sauve tout, l’amour transfigure tout.
Aimer son prochain comme soi-même c’est l’aimer non-seulement comme soi-même en quantité, c'est-à-dire autant que soi-même, avec autant d’intensité ; mais c’est l’aimer aussi comme nous-mêmes en qualité ; en tant qu’il est moi-même, et il est moi parce que je suis lui.
Sa vie est ma vie et ma vie est la sienne puisque par le fait de vivre nous nous renvoyons l’un l’autre au plus vrai de ce que nous sommes et donc pas forcément à la plus glorieuse réalité de ce que nous croyons être !
Mais plus encore que le quantitatif ou le qualitatif humains de l’amour du prochain ; prenons conscience de manière profonde et intime que l’Evangile est la révélation des profondeurs de cet amour :
En tout être humain nous avons à découvrir à la fois l’image de Dieu en lui et en même temps un membre solidaire du Christ, Lui-même solidaire de Son Père ; ou bien inversement ; aimons en Dieu un Père solidaire de Sa création et donc de tout homme ; au point de nous donner Son Fils unique et de le faire demeurer en nous…rappel implicite du mystère de l’incarnation auquel nous nous préparons par ce temps de jeûne.

Et si nous savons que le Christ est en nous, nous devons conscientiser dans la dimension spirituelle de notre coeur qu’Il est aussi dans l’autre ; dans le prochain, dans ce prochain qui –il s’en faut de peu parfois !- devient très vite un « ennemi », dans le sens où quand il me dérange, me gêne, m’interpelle négativement, bref me renvoie à ma propre image ; et donc me renvoie à ma propre réalité ; je le rejette, je l’ignore je l’exclue de ma vie.

Si l’attention du légiste n’a été retenue que par le sens du commandement « aimer son prochain », la finalité de cette parabole est peut-être aussi et avant tout de mettre l’accent sur l’amour de soi-même…

Qu’est-ce que « s’aimer soi-même » ?
Ce n’est certainement pas avoir la mentalité du pharisien qui dans un élan de narcissisme absolu s’admire et se croit meilleur que tout le monde ! Non ! ce serait de l’orgueil mal placé et nous savons tous que l’orgueil tue, en tant qu’il est le péché par excellence.
Bien au contraire, s’aimer soi-même c’est nous mettre à l’école du publicain ; école d’humilité, d’appauvrissement et de douceur.
« S’aimer soi-même » c’est s’accepter tels que nous sommes ; dans la vérité, sous le regard incomparablement miséricordieux et aimant de Dieu.
« S’aimer soi-même » c’est donc accepter notre faiblesse, notre pauvreté (au sens large du terme) accepter nos limites et notre misère en prenant garde de ne pas tomber dans un esprit de révolte ni de nous installer confortablement dans notre petit malheur en nous apitoyant sur nous.
« S’aimer soi-même » c’est aussi se reconnaître dans ce que nous ne sommes pas et parfois croyons ou voudrions être.

Dieu aura donc le champ libre pour venir transfigurer le plus déconcertant de ce qu’il y a en nous et les pessimismes que nous portons sur nous-mêmes s’estomperont d’eux-mêmes.
Pour le coup ; en faisant à l’aide de Dieu ce travail intérieur ; nous aurons tout loisir de l’exercer sur notre prochain, en l’aimant par sa propre misère et au-delà de sa propre misère.
Puisque Dieu m’accepte tel que je suis, puisque je m’accepte tel que je suis, je me dois d’accepter mon prochain tel qu’il est afin que lui aussi m’accepte et m’aime tel que je suis.


Vaste programme n’est-ce pas ?!
En pourtant ! Les trois pôles que sont l’amour de Dieu, l’amour du prochain et l’amour de soi-même sont intrinsèquement liés les uns aux autres et disons le ; ils sont indissociables.
Quand quelque chose ne va pas dans notre vie il est facile d’en rejeter la faute sur une circonstance, une personne ou toute autre cause extérieure.
Non ! Quand quelque chose ne va pas dans notre vie c’est que la dimension spirituelle de notre être est atteinte ; autrement dit que l’un des pôles dont nous venons de parler est fragilisé ou souillé par notre orgueil.
Qu’à cela ne tienne ! Avec l’aide de Dieu il devient facile de rectifier le tir et de se recentrer grâce à ces trois repères qui deviennent une école de vie, pour nous et nos semblables et surtout une école de vie pour tous en vue de la Vie éternelle !

Chers frères et sœurs ; ne soyons pas effrayés par ces considérations il est vrai exigeantes, mais soyons confiants et n’ayons de cesse d’aller de l’avant !
Dans cette parabole du bon samaritain il est un fait ô combien encourageant si l’on y prête attention :
Il nous est dit en effet que ; certes ; le samaritain part après avoir pansé les plaies et secouru l’homme blessé… Mais il part en prenant bien soin d’annoncer qu’il reviendra.
Comment donc ne pas y voir une image du Christ qui Lui, n’a de cesse de revenir vers nous à tout moment ; par les sacrements que nous recevons, par notre prière personnelle qui n’est autre chose que notre désir ardent de Lui ; par le prochain en qui Il est présent, par le prochain qui partage notre vie ou qui croise notre route ?
Bien plus qu’une image, cette divine dynamique d’amour est une réalité de chaque instant…

Et puisque nous nous fêterons d’ici peu la Nativité, que nos cœurs soient ; comme à Béthléem ; autant de grottes (aussi sombres soient-elles) prêtes à accueillir humblement le Christ afin qu’Il vive et croisse en nous.


Amen !






Méditation d'un moine de l'Eglise d'orient

L'évangile du vingt-cinquième dimanche après la Pentecôte contient la parabole du Sama­ritain qui eut compassion du Juif assailli et blessé par les voleurs sur la route de Jérusalem à Jéricho. La para­bole est introduite par le rappel des deux grands comman­dements.

C'est le second de ces deux commandements qui donne occasion à un scribe de demander à Jésus : «Qui est mon prochain ? ». Le sens de cette parabole n'est pas seulement d'opposer à l'inhuma­nité du prêtre et du lévite qui passent outre la charité du Samaritain qui panse et hospitalise le Juif blessé, ni de condamner l'antagonisme ethnique et religieux entre Juifs et Samaritains, mais de proclamer cette vérité géné­rale : mon prochain n'est pas exclusivement celui que le sang, ou le territoire ou la croyance rendent proche de moi ; mon prochain est, à chaque moment, celui que Dieu rend proche de moi en le mettant sur ma route ; mon pro­chain est celui que je rends proche de moi en le servant, même s'il est un étranger ou un ennemi. Il dépend en grande partie de moi-même que tel homme soit ou non mon prochain. Et je puis m'efforcer d'agir de telle sorte que tout homme devienne mon prochain. Sur un autre plan, le Samaritain représente Jésus lui-même qui verse le vin et l'huile sur les blessures de la race humaine et se fait le prochain de chaque homme. «Lequel... à ton avis s'est montré le prochain ?... Celui qui a pratiqué la misé­ricorde...».


Dans l'épître (Ephésiens 4: 1-17), Saint Paul recom­mande de «conserver l'unité de l'Esprit par le lien de la paix», parce qu'il y a un seul corps, un seul Esprit, un seul Seigneur, un seul Dieu. Le conseil de Paul doit être pris dans un sens très concret et appliqué aux circons­tances et aux difficultés de notre vie quotidienne. A quoi bon développer des pensées élevées sur l'unité en Christ ou l'unité de l'Eglise si je ne m'efforce pas tout d'abord de sauvegarder «l'unité de l'Esprit» et le «lien de la paix» avec les membres de ma famille, avec ceux qui vivent dans ma maison, avec ceux que la vie professionnelle, la vie économique, la vie civique me font rencontrer chaque jour ? «Unité de l'Esprit» et «lien de la paix» : ces deux grands mots ne deviendront vrais pour moi que si je puis les traduire pratiquement dans les petits détails de la journée, dans les détails de la cuisine et du bureau.
L’épître de ce dimanche rejoint ici l'évangile, car c'est par l'unité de l'Esprit et le lien de la paix qu'un autre homme devient mon prochain.